COURS D’INTRODUCTION AU NOUVEAU TESTAMENT
Préambule
Préparation lointaine à l’exégèse, ce cours consiste dans un premier temps à se poser la question du rapport entre le Nouveau et l’Ancien Testament et de souligner certains éléments socioculturels du monde juif de l’époque de Jésus. L’étudiant acquiert peu à peu quelques méthodes de lecture et un vocabulaire technique biblique. Le cours s’articule sur huit points:
1° le nom « Nouveau Testament’, un terme corrélatif;
2° formation et composition du Nouveau Testament;
3° notion de l’inspiration de l’Écriture Sainte;
4° historique du Canon du Nouveau Testament;
5° les genres littéraires dans le Nouveau Testament;
6° différentes approches de lectures du Nouveau Testament;
7° Le milieu du Nouveau Testament;
8° Aperçu général sur chaque livre du Nouveau Testament.
Bibliographie sélectionnée:
AZOU, G., The Formation of the Bible, London 1963.
BEAUCAMP, Parler d’Écritures saintes, éd. Seuil, Paris 1987.
CHARPENTIER, E., Pour lire l’Ancien et le Nouveau Testament, Paris 1990.
DELHEZ, C., Apprendre à lire la Bible, Kinshasa 1986.
GRANT, R. M., La Formation du Nouveau Testament, Paris Seuil, 1969.
GRÉLOT, P., La Bible. Parole de Dieu. Introduction théologique à l’étude de l’Écriture Sainte, Desclée, Paris 1965.
HARRINGTON, W., Nouvelle Introduction à la Bible, Paris, Seuil, 1971.
L’Interprétation de la Bible dans l’Église (Document de la Commission Biblique Pontificale), Città del Vaticano, Roma, Libreria Editrice Vaticana, 1993.
VANHOYE, A., « Salut universel par le Christ et validité de l’Ancienne Alliance« , in NRT 116 (1994), 817ss.
Centre
Informatique et Bible (Maredsous),Petit Dictionnaire de la Bible, Brepols,
Verbum Bible 1996
I. Le nom « Nouveau Testament », un terme corrélatif
I.1. Prolongement et perfectionnement de l’Ancien Testament
C’est lui qui nous a rendus capables d’êtres ministres d’une Alliance nouvelle, non de la lettre mais de l’Esprit; car la lettre tue, mais l’Esprit donne la vie (2Co 3, 6). Saint Paul considère l’événement Jésus comme l’inauguration d’une nouvelle alliance par rapport à celle que Moïse concluait avec Israël. La nouveauté est de découvrir que dans l’alliance mosaïque il y avait des éléments qui conduisaient à l’alliance de Jésus. Pour Paul si on reste à la lettres des écrits on ne trouve pas cette nouveauté. Il faut entrer dans l’esprit des Écrits. Or entrer dans l’esprit des Écritures c’est croire en Jésus. C’est lui qui dévoile l’esprit de l’Ancien Testament: Jusqu’à ce jour, lorsqu’on lie l’Ancien Testament, ce même voile demeure. Il n’est pas levé, car c’est en Christ qu’il disparaît. Oui, jusqu’à ce jour, chaque fois qu’ils lisent Moise, un voile est sur leur cœur. C’est seulement par la conversion au Seigneur que le voile tombe (2 C0 3, 14b-16). Ici « le thème principale du passage n’étant pas la diathêkê, mais le « voile » (kalumma) qui empêche de voir. Un parallélisme entre la fin de 2 Co 3, 14 et la phrase de 2 Co 3, 16 confirme que Paul veut parler de l’abolition du voile et non de l’alliance([1]) ». Il ne veut pas déclarer que les écrits inspirés de « l’ancienne alliance » aient perdu toute valeur, car il se réfère toujours à l’Ancien Testament dans ses argumentations (2 Co 3,7; Ex 34, 30 et 2 Co 3, 16 et Ex 34, 34).
Normalement en français lorsqu’on veut parler des écrits inspirés, on ne dit pas « l’ancienne alliance », mais « l’Ancien Testament ». Du même mot grec diathêkê, traduction de l’hébreu, berît, on a en français deux mots: « alliance » et « testament ». Il faut considérer le contexte pour en découvrir le sens propre. « Les écrits pauliniens distinguent très fortement deux aspects de l’Ancien Testament: son aspect prophétique et son aspect d’institution. Ils attestent la valeur permanente du premier, mais contestent radicalement le second »([2]) (Rm 3, 19-22). L’Épître aux Hébreux considère que l’Ancienne Alliance est abrogée à cause de son imperfection (He 7, 18; 10, 9). En même temps l’alliance a été remplacée par une deuxième, nous dit He 8, 13. Celle-ci se réalise dans le Christ:
« Selon He 11, 39-40, la foi des ‘anciens’, tout en étant agréable à Dieu (11, 5-6), ne leur a pas ouvert l’accès de la promesse avant la venue du Christ. Pour eux comme pour les chrétiens, la médiation sacerdotale du Christ a donc été décisive. À plus forte raison le sera-t-elle, même sans qu’elle le sachent, pour les générations juives suivantes. Parce qu’il a ‘pris en charge la descendance d’Abraham’ (2, 17), prenant sur lui leur souffrance et leur mort (cfr 2, 9-10.14.18), Dieu a établit son Fils ‘héritier de tout’ (1, 2); ‘en lui soumettant toutes choses, il n’a rien laissé qui puisse lui rester insoumis’ (2, 8) »([3]).
Sans négliger l’importance de cette question théologique sur la relation entre l’Ancienne Alliance et la Nouvelle Alliance, nous nous limitons à considérer la genèse du texte du Nouveau Testament en tant que support scripturaire de la Nouvelle Alliance. Nous nous interressons au statut de ce texte en tant que prolongement nécessaire de l’Écriture Sainte et à la théologie de chaque livre du Nouveau Testament. Nous parlerons moins du rapport entre ancienne alliance et nouvelle alliance que du rapport entre Ancien Testament et Nouveau Testament, dans le sens que, en francais, ancien ou nouveau Testament désigne un ensemble d’ écrits inspirés.
II.2. Éléments socio-culturels juifs pour comprendre le NT
Notre compréhension du Nouveau Testament doit passer par la connaissance de l’Ancien Testament, mais aussi par la connaissance de la littérature judaïque qui nous renseigne comment on comprenait la Bible à l’époque: « le N.T. hérite non seulement d’une Bible traduite, mais d’une Bible interprétée »([4]). En effet, au Ier siècle de notre ère, le judaïsme était en pleine mutation. Les idées et les pratiques diverses se bousculaient, au risque d’en arriver à un émiettement de la société juive; de ce bouillonnement sortiront des sectes rejetées, comme l’Église chrétienne. Étant donné que le juda•sme n’a pas de centre reconnu par tous et faisant autorité en matière religieuse, hormis la Torah, la pensée reste très vivante et diversifiée selon les milieux et les mouvements religieux([5]). Les thèmes importants concernent le monthéisme, l’Alliance et la Loi. Mais un sentiment de la transcendance divine provoquait une multiplication des intermédiaires entre Dieu et les hommes: les anges et les esprits, les esprits mauvais et les démons, le messie, le prophète eschatologique et le Fils de l’homme. Face à la négation fréquente de l’immortalité dans le monde hellénistique, les juifs croyaient généralement à la rétribution future et à une certaine vie dans l’au-delà, mais les langages pour traduire ces convictions étaient multiples([6]). Tout ces thèmes se retrouvent dans le Nouveau Testament avec une nouvelle clé de lecture qui est la personne de Jésus de Nazareth.
II. Formation et Composition du Nouveau Testament
II.1. Traditions orales et Traditions écrites
Le texte du Nouveau Testament est né des Traditions orales et des Tradition écrites([7]). On racontait ce qui s’est passé dans l’événement Jésus. Le christianisme s’est développé dans un milieu fertile en traditions orales, à savoir à l’interieur du judaïsme palestinien (Josèphe, Ant., 13, 297, 408). Le Nouveau Testament atteste des traditions orales vivantes (Mc 7, 1-3.7-9; Gal 1, 14). Tradition a le sens de transmission d’un enseignement de génération en génération. Pour une meilleure information il faut recourir aux épitres de Paul qui sont plus anciennes que les évangiles. Dans la Ie aux Corinthiens (vers 56) Paul parle de ce qu’il a reçu et transmis (1 Co 15, 1-6). L’ensemble comprend deux parties: la première est sur la mort et la résurrection de Jésus, la seconde sur ceux à qui il est apparu après sa résurrection. Cela signifie qu’avant Paul , dès Jérusalem, les chefs de l’Église avaient déjà fourni des commentaires sur la mort et la résurrection de Jésus. Le Christ est mort pour nos péchés conformément aux Écritures serait une allusion Is 53, 6-12, qui établit une relation entre la mort du Serviteur souffrant et le péchés des autres hommes. L’affirmation il a été enseveli, il est ressuscité conformément aux Écritures fait penser à deux textes de l’Ancien Testament : le premier en Is 53, 9 qui dit: on lui a dévolu sa sépulture au milieu des impies, et le deuxième en Os 6, 1-2 qui dit: Venez, retournons au Seigneur. C’est lui qui a déchiré et c’est lui qui nous guérira, il a frappé et il pansera nos plaies. Au bout de deux jours il nous aura rendu la vie, au troisième jour, il nous aura relevés et nous vivrons en sa présence. Les verbes utilisés dans cette phrase: rendre la vie et relever (du grec, egeirô = relever, ressusciter) convient à l’événement pascal. Tout cela montre que la tradition transmise par Paul n’est pas un récit pur et simple de faits historiques de la vie de Jésus, mais ceux-ci sont enrobés dans une interprétation théologique avec référence au plan de Dieu tel que les prophètes l’ont révélé. Parfois les lettres de Paul font référence à une parole du Seigneur avant que les évangiles ne soient écrits: 1Th 4, 15-18 fait penser à Mc 9, 1 et Mt 24, 30-44: les morts ressusciteront au retour du Seigneur; de même 1Th 5, 1-2 fait allusion Mt 24, 42-44: le Seigneur viendra comme un voleur. En 1Co 7, 10-12, Paul distingue l’enseignement venu de la tradition sur les recommandations du Seigneur et les conclusions que lui en tire. Les phrases que la femme ne se sépare pas de son mari et que le mari ne répudie pas sa femme , se réfèrent évidemment à une parole de Jésus conservée dans les évangiles synoptiques (Mc 10, 11-12; Mt 19, 1-9; Lc 16, 18). La subvention des chrétiens aux besoins matériels de leurs ministres encouragée en 1Co 9, 14 fait penser à la parole du Seigneur rapportée par Mt 10, 10: l’ouvrier mérite sa nourriture et Lc 10, 7: l’ouvrier mérite son salaire.
Ces exemples témoignent que Paul connaissait des traditions orales concernant les paroles et les actes de Jésus. Paul les a utilisées avec des intentions bien déterminées lorsqu’il écrivait aux églises qu’il avait fondées, mais rien indique qu’il les avait beaucoup déformées.
D’autres traditions orales concernant les paroles et les actes de Jésus étaient encore en circulation à l’époque de la rédaction des évangiles, aussi après. On peut s’en rendre compte en lisant Jn 20, 30 et Jn 21, 25. Ces deux dernières références affirment que toutes les paroles du Seigneur n’ont pas été rapportées. Dans les Actes des Apôtres, on trouve une parole attribuée au Seigneur Jésus, mais elle n’est rapportée par aucun autre écrit du Nouveau Testament (Ac 20, 35: il ya plus de bonheur à donner qu’à recevoir). D’autres paroles ne sont rapportées que par les évangiles apocryphes. « Bien que les principaux chef de l’Église aient quasi universellement rejeté les évangiles apocryphes et autres document analogues, ils ont souvent continué à accepter des paroles contenues dans ces évangiles et non dans les quatre. Il n’est pas jusqu’à saint Jérôme qui, rigoriste qu’il fut, n’ait consenti à reconnaître que dans la « boue » des apocryphes il pouvait y avoir de l’or »([8]). Un exemple concerne la foi en l’Assomption de la Vierge Marie dont la première attestation littéraire remonte à un évangile apocryphe du II e siècle.
Le processus de formation du Nouveau Testament s’est déroulé sur deux siècles au moins, au cours desquels l’enseignement de Jésus et des apôtres a été([9]):
1° rédigé par écrit et mis en circulation parmi les églises chrétiennes (2 P 3, 15-16);
2° accepté par ces églises selon certaines rédaction et non selon d’autres;
3° considéré d’abord comme la clé de l’Ancien Testament, puis comme son égal en autorité;
4° finalement considéré comme « Écriture » inspirée.
Ce processus avait pour but une grande précision et clarté dans le domaine de la doctrine, de la discipline et du culte. En général les chrétiens du IIe s. considéraient comme faisant autorité quatre évangiles, treize épîtres de Paul, I Pierre, I Jean et l’Apocalypse (quelquefois aussi les Actes des Apôtres). L’Épître aux Hébreux, l’Épître de Jacques, l’Épître de Jude, la IIe de Pierre, étaient parfois mises en doute. Le style et le contenu des IIe et IIIe Épîtres de Jean incitaient à coup sûr ceux qui acceptaient l’Évangile et I Jean à accepter aussi ces deux petites épîtres. Le problème épineux est celui des divers documents qui se situent en marge de l’Ancien Testament d’autant plus que lui-même n’étaient pas encore bien défini et sa version grecque, la Septante, contient des livres que les Juifs du IIe s. n’acceptaient pas. De même le Nouveau Testament ne se formera que petit à petit. Par conséquent des livres contenant des traditions supposés provenir de Jésus et des Apôtres demeurèrent en usage chez la plus part des chétiens.
Les critères selon lesquels les livres étaient acceptés ou rejetés n’apparaissnt pas très clairement définis. Il y en avait deux principaux
1° un livre avait été ou non transmis par la tradition. On interroge les chefs de communauté chrétienne. Les souvenirs des fidèles les plus âgés étaient vraisemblablement exactes dans la plupart des cas.
2° un livre avait été écrit par un apôtre, par un disciple d’un apôtre ou non. D’où la grande importance du titre écrit au début ou à la fin de l’ouvrage.
En bref nous devons considérer le texte actuel du Nouveau Testament comme le produit de la Grande Église qui transcendait les différences locales. Sans avoir nécessairement été acceptés par tout le monde, les livres du Nouveau Testament sont ceux qui en sont venus à être partout acceptés par la grande majorité des chrétiens. Les mêmes livres, sans êtres nécessairement apostoliques, étaient ceux qui reflétaient le mieux les croyances fondamentales de l’Eglise primitive. D’autres livres ont toujours été refusé par les Églises, car elles les jugeaient non conformes à la foi dont témoignaient les premiers chrétiens. Un exemple: l’Apocryphe Évangile selon Thomas renferme 114 sentences de Jésus dont la substance pour certaines est authentiquement évangélique, mais l’ensemble est fortement marqué par une doctrine sectaire. A elle seule la dernière sentence suffit pour comprendre pourquoi les communautés chrétiennes ont refusé cet évangile: « Simon Pierre dit aux disciples: que Marie sorte de parmi nous car les femmes ne sont pas dignes de la vie. Jésus dit: voici que je l’attirerai pour que je la rende mâle afin qu’elle aussi devienne un esprit vivant pareil à vous, les mâles! Car toute femme qui sera faite mâle entrera dans le Royaume des Cieux » (Évangile selon Thomas, § 118)([10]). Comparez cette sentence avec l’accueil évangélique réservé aux femmes (Lc 8, 1-3; Mt 27, 55; Mc 15, 41; Jn 4, 27; Jn 20, 16-17; Ga 3, 27-29).
II. 2. Composition du Nouveau Testament
Voici la composition actuelle du Nouveau Testament, produit d’un long processus du choix opéré par l’Église qui, au IIIe siècle, délimita le nombre des livres inspirés.
Les Évangiles: Mt; Mc; Lc (les trois s’appellent « Évangiles Synoptiques »); Jn.
Les Actes des Apôtres;
Les Lettres de St Paul: Rm; 1 Co; 2 Co; Ga; Ep; Ph; Col; 1 Th; 2 Th; 1 Tm; 2 Tm; Tt; Phm; He (dont l’authenticité paulinienne est douteuse);
Les Lettres Catholiques: Jc; 1 P; 2 P; 1 Jn; 2 Jn; 3 Jn; Jd;
L’Apocalypse de Saint Jean (qui fait partie de la « Littérature Johannique », c’est-à-dire, l’Évangile selon Saint Jean et les trois lettres johanniques).
N.B. Dans la Bible, les livres ne sont pas arrangés selon l’ordre chronologique. C’est le travail des exégètes de nous informer sur l’histoire de la formation de la Bible.
II. 3. Le problème des Apocryphes du Nouveau Testament
Outre les livres canoniques, un petit nombre d’autres documents circulaient parmi les chrétiens, très tôt dans le IIe siècle. L’usage de tels documents avait de précédents dans certaines communautés comme celle de Qumrân où un livre apocryphe, le Ie Livre d’Énoch, était lu avec enthousiasme. L’Épître de Jude révèle une situation analogue chez certains chrétiens: comparer L’Assomption de Moïse et Jude 9; Ie Livre d’Énoch et Jude 14-15.
Les adeptes de divers groupes minoritaires à l’intérieur ou en marge des églises ne se contentaient pas de travailler à l’exégèse des livres généralement acceptés mais ils se mirent à rédiger des évangiles, actes, épîtres ou apocalypses supplémentaires. Leurs activités seraient encouragées par des affirmations comme celles de Jn 20, 30 et 21, 25.
Il est difficile de déterminer de quelle autorité jouissaient ces écrits supplémentaires([11]). Origène, par exemple, se sert trois fois de l’Évangile selon les Hébreux mais exprime chaque fois des doutes sur son autorité et rejette nettement l’Évangile selon les Égyptiens (cfr Jer. hom. 15, 4; Lc hom. 1). Hippolyte dit que les gnostiques naasséniens se servaient de l’Évangile de Thomas (cfr Philosophoumena 5, 7, 20).
Grâce à la littérature chrétienne antique on peut conclure que les Apocryphes ont été abandonnés progressivement jusqu’à la fixation du canon du Nouveau Testament. Ils étaient employés à Alexandrie et à Antioche sans hésitation jusqu’au IIe siècle. Vers la fin du IIe siècle les auteurs non gnostique comme Irenée, Clément et Origène se montrent prudents par rapport aux Apocryphes; ils reconnaissent quatre évangiles, et quatre seulement.
Le plus important des évangiles apocryphes qui nous soient parvenus est l’Évangile de Thomas. L’ensemble de l’évangile a été trouvé à Nag Hammadi en Égypte en 1945 dans une version copte du IVe siècle. Il contient environs 114 paroles, paraboles et brefs dialogues attribués à Jésus([12]). Il n’est pas de notre intérêt de faire un exposé complet sur les Apocryphes. Notre intérêt se porte plutôt sur les écrits canoniques, c’est à dire ceux que l’Église reconnait comme inspirés.
III. Rappel sur la notion de l’inspiration de l’Écriture Sainte
Le fait de l’inspiration est témoigné par l’Écriture, les Pères de l’Eglise et les déclarations des conciles et des papes. L’inspiration signifie que l’auteur sacré était inspiré, éclairé par l’Esprit Saint (Jn 14, 26; 16, 13).
Plusieurs passages y font allusion. Sur ordre de Dieu Mo•se écrit le livre de l’Alliance (Ex 24, 4ss; 34, 27). Jérémie rédigea les oracles du Seigneur (Jr 30, 2; 36, 2). Toutefois le terme inspiratus, theopneustos appliqué à la Bible ne se trouve pas dans l’AT. Il y a seulement deux textes du NT qui parlent de l’étendue et de la nature de l’inspiration, mais tous les deux concernent l’AT: Il s’agit de 2 Tm 3, 15-17; 2 P 1, 20-21. Quant à l’inspiration des livres du NT, nous ne trouvons aucune citation explicite. Mais dans 2 P 3, 15, les Épitres de St Paul sont mises sur le même pied que les autres Écritures, donc elles sont certainement considérées comme inspirées.
La doctrine catholique sur l’inspiration biblique se trouve dans les diverses interventions spécifiques qui conduiront à la définition précise du Concile Vatican I que Vatican II réitère: « Ce qui a été divinement révélé, et qui est contenu et exposé dans la Sainte Écriture, a été consigné sous l’inspiration du Saint-Esprit. Les livres entiers tant de l’Ancien que du Nouveau Testament, avec toutes leurs parties, la Sainte Mère Église les tient, en vertu de la foi reçue des Apôtres, pour saints et canoniques, parce que, composés sous l’inspiration du Saint-Esprit, ils ont Dieu pour auteur, et ont été transmis comme tels à l’Église elle-même » (DV 11, Vatican I, Denz 1787). Contrairement à Philon qui pensait que l’inspiration faisait violence à la personnalité des auteurs sacrés, le Concile affirme: « Pour la rédaction des livres saints, Dieu a choisi des hommes; il les a employés en leur laissant l’usage de leurs facultés et de toutes leurs ressources, pour que, lui-même agissant en eux et par eux, ils transmettent par écrits, en auteurs véritables, tout ce qu’il voulait, et cela seulement »([13]).
IV. Historique du Canon du Nouveau Testament
L’histoire des origines de la formation du Nouveau Testament montre que ses parties n’avaient pas une autorité égale et l’histoire de l’Église montre que les chrétiens n’avaient pas une autorité égale. Il y avait un noyau central, à savoir les quatre évangiles et les treize épîtres pauliniennes, qui ont été acceptés à la fois plus vite et plus généralement que tous les autres([14]).
IV.2. Renseignement des apologistes grecs du IIe siècle
Le deuxième groupe d’informations se trouve chez les apologistes grecs. Dans ses écrits apologétiques Justin (env. 150-160), par exemple Ie Apologie (28, 1), utilise l’expression « d’après nos écrits » les lecteurs peuvent apprendre que « les chrétiens appellent le chef des démons des noms de « serpent », « Satan » et « diable ». Dans le Dialogue (103, 5) il dit que Moise l’appelle « serpent », Job et Zacharie l’appellent « diable » et Jésus l’appelle « Satan ». C’est un renvoi clair aux Synoptiques (Lc 10, 18; Mt 4, 10, etc…). Dans la Ie Apologie (66, 3; 67, 3) Justin parle des « souvenir » ou » mémoires » des apôtres qu’il appelle aussi « évangiles ». Il atteste que ces livres racontent ce que Jésus a fait et a dit, et comme les écrits prophétiques ils sont lus à haute voix pendant le culte chrétien. Bien que dans l’Apologie et dans le Dialogue l’autorité primordiale reste pour Justin l’Ancien Testament, il n’en est pas moins vrai que les Évangiles tout comme les livres de l’Ancien Testament, faisaient partie de ce qu’il appellait « nos Écritures ». Dans le Dialogue, Justin précise que les « mémoires » ont été composés par « les apôtres et leurs successeurs » (103, 8). Il cite l’Évangile de Jean une seule fois (I Apologie 64, 1) et affirme que l’Apocalypse a été écrite par Jean l’un des apôtres du Christ (Dialogue 81, 4). Ne possédant que les écrits apologétiques de Justin nous ne connaissons pas toute la composition du « Nouveau Testament » dont il se servait([15]).
Le disciple de Justin, Tatien qui a composé son Discours aux Grecs vers l’an 176, ne mentionne jamais Jésus de facon explicite et ne fait pas de citation précise du Nouveau Testament, mais seulement de fréquentes allusions aux épitres de Paul([16]) et dans son fameux Diatessaron il combinait en un seul contenu les quatre évangiles canoniques.
Ayant perdu les écrits de Méliton de Sardes, sauf quelques fragments de son homélie pascale, nous ne retenons que son expression: « les anciens livres » qui peut signifier » les livres de l’ancienne alliance ». Nous supposons qu’il connaissait aussi » les nouveaux livres », c’est-à-dire, « les livres de l’ancienne alliance ». Nous supposons qu’il connaissait aussi » les nouveaux livres », c’est-à-dire, « les livres de la nouvelles alliance » par rapport aux livres de l’ancienne.
Athénagore, un apologiste qui écrivit vers 178, probablement à Alexandrie, fait dans sa Supplique au sujet des chrétiens, un usage explicite des écrits contenus dans les deux Testaments. Il reconnaît l’inspiration de Moïse, d’Isaïe, de Jérémie et « des autres prophètes ». Il se réfère au Sermon sur la montagne, cite Mt, Mc, Lc, Jn et fait beaucoup d’allusion aux épitres de Paul.
L’évêque Théophile d’Anthioche, vers 180, adressa à un certain Autolycus une Apologie en trois livres qui contiennent des allusions aux quatre évangiles, à toutes les éppîtres de Paul (moins 1 et 2 Th), à l’Épître aux Hébreux, à la Ie de Pierre, à la Ie de Jean et à l’Apocalypse.
Sachant que les apologistes parlaient aux adversaires juifs et païens pour lesquels utliliser le Nouveau Testament comme « Écriture Sainte » ne servirait à grand’ chose, nous pouvons conclure que l’omission de l’expression est volontaire. Toutefois, de toutes les informations recueillies chez les apologistes, « on pourrait dire que tandis que l’Ancien Testament était toujours considéré dans l’Église du IIe siècle comme Écriture au premier chef, un processus était en cours d’élaboration qui devait aboutir à ce que soient reconnus eux aussi comme livres inspirés les livres du Nouveau Testament »([17]).
À la fin du IIe siècle, les chrétiens gnostiques aussi bien qu’ « orthodoxes, connaissent un noyau d’écrits que presque tous acceptaient, à savoir les quatre évangiles, un nombre variable d’épîtres de Paul (10 ou 13), quelques autres lettres (1 P et 1 Jn) et l’Apocalypse. Quelques échos des Actes se trouvaient dans la Ie Épître de Clément et dans l’Apologie de Justin. Ce recueil de base était considéré comme « Écriture ». Avec l’incident de Rhossos en 190, quand Sérapion d’Antioche autorisa aux chrétiens de lire un évangile attribué à Pierre et qu’à cause de cela les Docètes pensèrent que l’évêque voulait se convertir à leur secte, les critères d’acceptation d’un livre deviennent sevères:
1. les livres devaient être authentiquement apostoliques, c’est à dire en concordance avec ceux du recueil de base universellement reconnu comme apostolique;
2. il fallait qu’ils aient été transmis par la tradition depuis l’époque apostolique.
L’application des ces critères était très compliquée, car on remarquait la différence entre l’Évangile de Jean et les Synoptiques, et bien plus les chrétiens de différentes régions avaient l’habitude de lire des livres différents.
Les efforts déployés par les Alogos, ainsi nommés parce qu’ils rejetaient l’Évangile de Jean et sa doctrine du Logos, et par Gaïus de Rome contre les livres de Jean ne dénotent pas d’un doute général, mais ils avaient pour objet de débarrasser ces livres de l’autorité que leur attribuaient les montanistes et d’autres chrétiens.
Les témoignages les plus importants sur le Nouveau Testament à la fin du IIe siècle proviennent de Irénée de Lyon, évêque missionnaire de Lyon vers 185. Il donne un tableau précis des évangiles universellement reconnus: quatre et quatre seulement, écrits par Matthieu, Marc, Luc et Jean; Matthieu et Jean étaient des apôtres, Marc et Luc des disciples de Pierre et de Paul. Il connaît 13 épîtres de Paul et doute de l’authenticité paulinienne de l’Épître aux Hébreux. Citations et allusions se présentent ainsi par ordre de fréquence: 1 Co (102 fois), Rm (84 fois), Ep (37 fois), Ga (27 fois), 2 Co (18 fois), Col (18 fois), Ph (13 fois), 2 Th (9 fois), 1 Tm (5 fois), 2 Tm (5 fois), Tt (4 fois) et 1 Th (2 fois)([18]). Quatre facteurs pastoraux ont poussé les Églises d’élaborer une liste officielle des livres du NT (Canon du NT):
1. les nombreux apocryphes qu’il fallait rejeter
2. l’hérésie de Marcion qui avait composé son propre canon: Lc et dix lettres de Paul
3. les Montanistes, hérétiques qui prétendaient avoir reçu du Saint-Esprit des révélations nouvelles,
4. un grand nombre d’écrits gnostiques alors en circulation
IV. 3. Formation progressive et lente du Canon
Au début du 3e siècle le canon comprenait presque tous les livres canoniques. La liste la plus ancienne qui nous soit parvenue est celle du fragment de Muratori (vers 180), découvert à la Bibliothèque ambrosienne de Milan en 1740. Elle comportait les livres acceptés à Rome vers l’an 200. He, 1 et 2 P, 3 Jn et Jc n’y sont pas mentionnés. Les Papyrus Chester Beatty P45,P 46,P 47, qui sont de la première moitié du 3e siècle, contiennent tous les écrits du NT, sauf les épîtres catholiques. Les grandes Églises, grecque, latine, et syrienne n’adoptaient pas la même attitude envers ses écrits. Athanase, en 367, énumère les vingt-sept livres. La canonicité de l’Apocalypse fut encore discutée par certains théologiens au cours des 5e et 6e siècles.
Au quatrième siècle, les textes dont nous disposons montrent que l’autorité de l’épître aux Hébreux et des épîtres catholiques est de plus en plus reconnue en Occident pendant que l’Apocalypse était contestée. Le canon latin fut confirmé en Afrique par les conciles d’Hippone (393) et de Carthage (397), en Italie par la lettre d’Innocent I (401-417) à Exupère. En 382 le Synode de Rome avait fixé le canon, la liste officielle de livres saints pour l’Église Catholique, et le même canon fut confirmé au Concile de Trente (1546): 47 livres pour l’AT et 27 pour le Nouveau Testament.
Peut-on faire confiance à cette liste ?
C’est dans une révélation faite à l’Église par le Saint-Esprit qu’il faut chercher le seul critère objectif et adéquat de la canonicité …Lorsqu’elle garde et protège l’Écriture, elle ne voit pas seulement un dépôt à préserver; elle y trouve plutôt l’expression parfaite de sa propre pensée. Il s’agit toujours de la pensée de d’un même Esprit, celui du Christ »([19]).
Nous faisons confiance que l’Esprit de Dieu assiste l’Église dans sa marche à travers les siècles. Il l’avait éclairée dans le choix des textes qui la guident dans la doctrine, la discipline et le culte (2 Tm 3:15-17; Ac 2:42). D’ailleurs dans le Nouveau Testament, non seulement Dieu incarné agit sur l’histoire mais il est devenu un fait de l’histoire([20]). C’est d’ailleurs des éléments de la culture humaine, les genres littéraires que le Dieu a utilisés pour transmettre sa parole éternelle aux hommes contingents.
V. Les genres littéraires dans le Nouveau Testament
L’Encyclique « Divino afflante Spiritu » de 1943 reconnaît la présence de différents genres littéraires dans la Bible. Ce sont les formes variées ou manières d’écrire utilisées communément entre les hommes d’une époque ou région, mises en constante relation avec des types de communication déterminés. Elles peuvent concerner des livres entiers (Évangile, Actes, Lettres, Apocalypse) ou des péricopes plus ou moins longues (parabole, récit de miracle, paradigmes, etc) ou une simple phrase (apophtègmes, dits sapientiels, dits prophétiques, etc).
V.1. Le genre « Évangile » (du grec « euangelion »)
Dans la forme commune les évangiles évoquent l’emploi classique, mais dans la sémantique biblique, ils ont le sens de « bonne nouvelles » au sens particulier de » salut messianique » (Is 40-61) qui s’actualise en Jésus. Donc dans la traditio n chrétienne ce mot a trois dimensions: l’Évangile prêché par Jésus, l’Évangile concernant Jésus, l’Évangile qu’ est Jésus.
Au deuxième siècle le terme « Évangile » acquiert le sens technique de « message de salut apporté à nous par Jésus et prêché oralement par l’Église » puis comme » recueil d’écrits actualisant des paroles et actes de Jésus.
Ce genre littéraire « évangile » est en quelque sorte une création originale des chrétiens, surtout à cause du kérygme qu’ils annoncent, même si sur certains aspects les « évangiles » chrétiens ressemblent au genre littéraire des « histoires actualisantes » (Bioi, Praxeis, Apomneumoneumata). *Les caractéristiques du genre littéraire « Évangile sont les suivantes:
a) lien avec une tradition précédente: l’évangéliste se sert de matériel oral ou écrit;
b) cadre commun: baptême de Jésus, vie publique de Jésus, récit de la passion et de la résurrection (Ac 1, 21-23);
c) le kérygme est annoncé sous forme de récit historique;
d) une référence actuelle à une communauté dans une situation concrète
*Les formes littéraires du genre « Évangile »:
A. La tradition de la parole: les paroles de Jésus ont valeur normative
– des paraboles: la parabole se réfère aussi au « mashal » vétérotestamentaire et indique une parole qui contient une comparaison ou provoque une comparaison. Elle contient une gamme de sous-formes: proverbe, paradoxe, enigme, métaphore, allégorie. Dans les Évangiles, les paraboles sont des comparaisons très développées qui s’ouvrent avec les particules hôs, hôsper ou avec l’expression homoios ou le verbe homoiovô.
L’essentiel de la parabole est de faire participer, à travers un récit fictif, l’auditeur au dialogue (Mt 18, 12; 21, 28) sur une situation réelle, nouvelle et décisive et produire en lui un effet, c’est – à dire le conduire à émettre une évaluation et un jugement sur la situation. Cette situation nouvelle et décisive est le Règne de Dieu. « Le Royaume de Dieu est semblable à ….., à quoi pouvons-nous comparer le Règne de Dieu…., il leur enseignait en parabole… il dit une parabole … » (Mc 4, 2.26.30; Mt 13, 24.31.33).
Définition réelle de la parabole: Une comparaison de quelque chose que tout le monde connaît avec ce que l’on ne connaît pas du tout. Donc il ya deux éléments ou deux termes de la comparaison:
– le tableau: l’histoire tirée de l’expérience humaine-l’application: elle relève d’une réalité du domaine religieux. D’où le but de donner un enseignement religieux.
B. La tradition de l’histoire: les actes de Jésus indiquent qui est-il et q’est-ce qu’il fait pour nous. Elle comprend:
– Des disputes: récits qui racontent une discussion de Jésus avec ses adversaires dans une circonstance précise (Mc 2, 28-34; 7, 1-23; 10, 2-12; etc).
– Des récits des miracles: servent à révéler qui est Jésus, démontrer sa divinité et son pouvoir sur le mal (Mc 1, 21-31). Cette forme était également connue chez les Grecs: récits hellénistiques des prodiges.
– Des narrations historiques: récits d’événéments historiques (Mc 6, 17-29; Lc 9, 1ss)
– L’histoire de la passion qui se conclut chez tous les évangélistes, même si ceux-ci n’avaient pas la même tradition, par la mort et la résurrection de Jésus. Elle a à la base le kérygme fondamental de l’Église et vise l’annoncer en vue d’obtenir l’adhésion de foi de l’auditeur.
– Des compositions des récits: assemblage unitaire des récits et des logia divers (Mc 10, 1-45)
On peut alors conclure que les Évangiles Synoptiques sont des compilations dans lesquelles il faut distinguer la tradition de la rédaction. C’et dans les éléments traditionnels, qu’on trouve le sens primitif d’un logion ou d’un récit. Pour cela il faut relever le cadre rédactionnel qui indique l’application d’un logion de Jésus au besoin actuel d’une communauté concrète.
V. 2. Le genre « Actes »
Sur la forme, les « Actes » ressemble un peu Praxeis et vie didactique de philosophes grecs et de guides spirituels . La catégorie D cherche à établir la vraie tradition du fondateur après sa mort. Alors plusieurs hypothèses cherchent à classer les « Actes de Apôtres » chrétiens:
– une apologie de St Paul ou un document de controverse interne dans la communauté
– l’histoire de l’Église primitive
-un témoignage historique de foi sur le christianisme primitif.
À l’intérieur des Actes des Apôtres on trouve des formes littéraires particulières:
1. Les discours: composés par Luc qui s’inspirait des catéchèses de Pierre et Paul
a) messages primitifs adressés aux Juifs: Ac 2, 14-35; 3, 12-26; 4, 8-12; 5, 29-32; 10, 34-42; 13, 16-41; 14, 15-17; 17, 22-31
b) apologies personnelles de Paul: Ac 22, 1-21; 24, 10, 10-21; 26, 2-23;
c) discours variés: Étienne (7, 2-53); Pierre (15, 7-11)
2. Les sommaires: brèves descriptions de la situation de l’Église. Ils servent à trois choses: – introduisent ou concluent les éléments de la tradition; – présente la si tuation générale de l’Église; – soulignent l’unité fondamentale qui caractérisait l’Église primitive. Du point de vue exégétique les sommaires aident à établir le Sitz im Leben de la tradition primitive sur les logia et sur les actes de Jésus- Christ. Exemple de sommaire en Ac 8.
3. Les récits des miracles et des prodiges. Même si les critiques rationalistes nient l’historiscité de ces récits, nous savons que le Christ avait donné aux disciples le pouvoir de faire des signes et des prodiges (Lc 9, 1ss). En fait ils opéraient des miracles et des prodiges par l’Ésprit Saint qu’ils avaient reçu et qui est le protagoniste de l’histoire des Actes des Apôtres.
V. 3. Le genre « Lettre » (Épître)0
Sur les 27 livres du NT, on compte 21 qui ont la forme d’une lettre. Certains ne le sont que dans le sens large comme la Lettre de Jacques et la Lettre aux Hébreux.
1 Nombre: 21
2. Forme: la forme classique adoptée
3.Contenu: ce sont des lettres, car occasionnelle qui traitent des problèmes spécifiques.
4. Division générale: præscriptum: c’est l’entête: nom de l’auteur-nom du destinataire et une bénédiction. Ce la correspond aux lettres antiques juives et orientales.
-corpus:
-postscriptum: c’est la salutation finale qui , chez Paul, est ample et prend la forme d’une bénédiction. La lettre de Jacques et la 1 Jean n’ont pas de salutation finale.
5. Importance: Elles nous transmettent le kérygme-paradosis: c’est-à-dire le message du salut réalisé par Jésus-Christ dans sa mort et sa résurrection; on y trouve aussi beaucoup d’éléments de la catéchèse, de la liturgie et de la tradition de l’Église primitive. Ils sont utiles pour connaître le milieu de l’enseignement apostolique et l’histoire de l’ÉGLISE.
6. Plusieurs formes en trois types sont repérable dans les lettres:
a) Matériaux liturgiques de la tradition
– Des hymnes: spécialement christologiques : Ph 2, 6-11; Col 1, 15-20; Ep 1, 3-14; 5, 14; 1 Tm 9, 16; He 5, 7-10; 1 P 2, 22-24. Elles servaient de chants dans la liturgie chrétienne.
-Des confessions: brèves et prégnantes formulation de foi: 1 Co 15, 3-5; Rm 1, 3-4; 1 P 1 18-21; 3, 18-22 etc. Elles viennent de la liturgie sacramentaire.
– Des textes eucharistiques: ils rapportent des passages formés par la tradition, en référence à ce que Jésus avait fait à la Dernière Cène: 1 Co 10, 16; 11, 23-25 (= Mc 14, 22-25; Mt 26-29,; Lc 22, 15-20).
b) Matériaux parénétiques de la tradition: ils présentent comment la nouvelle communauté cherche une manière de vivre:
– Des catalogues de vertus et devices : Rm 1, 29-31; 13, 13; 1 Co 5, 10-11; 6, 9-10; 2 Co 12, 20-21; Ga 5, 19-21; Ep 4, 31; 5, 3-5; Col 3, 5-8; 1 Tm 1, 9-10; 2 Tm 3, 2-4; pour les vertus on a : Ga 5, 22-23; Ph 4, 8; Ep 4, 2-3; Col 3, 12-14; 1 Tm 4, 12; 6, 11; 2 Tm 2, 22; 3, 10; 1 P 3, 8; 2 P 1, 5-7.
-Des préceptes pour la famille: Ep 5, 22-6, 9; Col 3, 18-4, 1; 1 Tm 2, 8-15; Tm 2, 1-10; 1 P 2, 13-3, 12. Les motifs de l’éthique familiale sont mis en rapport avec le Christ et la vie éternelle.
-Des catalogues des devoirs personnels: devoirs des évêques (1 Tm 3, 1-7; Tt 1, 7-9); devoirs des « presbytres » (1 Tm 5, 17-19; Tm 1, 5-6); devoirs des diacres (1 Tm 3, 8-13) devoirs des veuves (1 Tm 5, 3-16).
c) Les formules (cf. Ga 1, 1)
– l’ homologia: brève profession de foi en Dieu chez les Juifs pieux, mais aussi en Jésus-Christ chez les chétiens: de façon développée en Ph 2, 6-11;
– la confession de foi proprement dite qui s’intéresse tantôt à la résurrection (Rm 10, 9: Dieu l’a ressuscité d’entre les morts), tantôt à la mort de Jésus-Christ (Rm 8, 8: Christ est mort pour nos péchés;
– la doxologie: une brève phrase de louange et de célébration de Dieu (Ga 1, 5);
– les formules christologiques qui indiquent la fonction salvifique du Christ et la communion du chrétien avec le Christ: « dia Iêsou Christou, en Christô Iêsou , en onomati.
V. 4. Le genre « Apocalypse »
Souvent le dernier livre du NT, l’Apocalypse, est classé dans le genre littéraire apocalyptique. En réalité son auteur le considère comme: révélation (1, 1) et comme prophétie (1, 3; 22, 7.10.18.19), 7 fois dans le livre, 2 fois le verbe « prophétiser, 8 fois le substantif « prophète ». Tandis que le mot « apocalupsis » apparaît une seule fois. Ce n’est donc pas facile de déterminer le genre littéraire de l’Apocalypse du Nouveau Testament.
Ce genre littéraire est répandu dans l’Ancien Testament (Is 24-27; 34-35; 38-66; Ez 37-48; Za 9-10; Jl 1-4; Am 7-9; Mi 3-7; Ha 3; So 1-2; Dn 7-12) avec des caractéristiques précises:
– vigueur prophétique;
-symbolisme intense qui appelle le peuple de Dieu à la conversion et qui annonce l’imminence du Règne messianique pendant lequel Dieu règnera sur le peuple;
-consolation annoncée au moyen des métaphores;
-symboles, allégories, dans lesquels les chiffres, les couleurs, les constellations, les phénomènes atmosphériques, les animaux ont une signification précise et profonde.
Entre le IIe siècle av. J.-C et le X siècle ap.J.-C., beaucoup d’apocalypse furent écrites dans le milieu juif: elles annonçaient la fin des temps et le début de l’ère du salut messianique:
Apocalypses relatives à l’AT | Apocalypses relatives au NT | |
1 Hénoc (éthiopien): 175-164 av. J.-C. Jubilé: 135-104 av. J.-C. Testaments des 12 Patriarches: IIe s. av. J.-C. Psaumes de Salomon : 80-40 av. J.-C. | Ascension d’Isaïe: I-II siècle ap. J.-C. Didaché 16: 55-100 ap. J.-C. Apocalypse de Pierre: 135 ap. J.-C. Pasteur de Hermas: 140-150 ap. J.-C. | |
3 Esdra: Ie s. av. J.-C. 4 Maccabées: fin Ie s. av. J.-C. Assomption de Moïse: 11av.-70 ap. J.-C. Oracles Sibyllins: IIe s. av.-III ap. J.-C. | Textes de Nag-Hammadi: IIe s. ap. J.-C. 5-6 Esdra: 200-300 ap. J.-C. Apocalypse de Paul: 250 ap. J.-C. Apocalypse de Thomas: IV s. ap. J.-C. | |
3 Maccabées : Ie s. av. ou Ie s. ap. J.-C. Martyre d’Isaïe: Ie s. av? -III ap. J.-C. 4 Esdra : fin Ie s. ap. J.-C. 2 Hénoch (slave): début Ie s. ap. J.-C. | Révélation de Stéphanos: Ve s. ap. J.-C. 1 Apocalypse de Jean (apocr.): V-VI s. ap. … 2 Apocalypse de Jean (apocr.): VI-VII s. ap. Mystères de Jean: VII-VIIIs. ap. J.-C. | |
2 Baruc: fin Ie s. ap. J.-C. 3 Baruc: IIe s. aap. J.-C. | Apocalypse d’André et Paul: VII s. ap. J.-C. Évangile des Douze Apôtres: env. 750 ap. … | |
Testament de Salomon: Ie s.-IIIe s. ap. J.-C. Apocalypse du pseudo-Daniel: Moyen-Âge | Investiture d’Abbaton: IX-Xe s. ap. J.-C. |
Les caractéristiques des apocalypses apocryphes: présentation des révélations divines dans des visions pendant lesquelles interviennent des anges et d’autres êtres célestes; la pseudonomie pour donner de l’importance à son écrit; emploi d’un langage symbolique et ésotérique.
Le Nouveau Testament s’est servi d’un genre littéraire existant. Les principales Apocalypses du NT: Mc 13; Mt 10; 24; Lc 21; 1 Th 4, 13-18; 2 Th 2, 1-12; 1 Co 20-28; 2 Co 12, 1-4; 2 P 3, 10-13; Ap.
V. 5. Les milieux des genres littéraires du NT
-Existence d’une communauté chrétienne primitive: Il y avait une continuité entre l’enseignement de Jésus et l’enseignement de l’Église primitive. Les faits de la vie de Jésus n’étaient pas oubliés, mais conservés jalousement, rapportés et ont été interprétés , sous la direction de l’Esprit Saint. Le milieu concret se retrouve dans:
1. Le cadre liturgique: on proclame la parole, on rompt le pain et on répète les paroles de Jésus dites pendant la Dernière Cène ( 1 Co 10, 16; 11, 23-26; Mt 26, 26-29 etc), on chante, on acclame le Christ (Ph 2, 6-11; Ap 5 etc), on célébre le baptême ( Rm 6, 3; Ga 3, 27) l’imposition des mains (Ac 6, 6; 8, 17-18; 13, 3; 19, 6).
2. Le cadre catéchétique: on instruit les néophites sur l’ÉCRITURE, SUR LA VIE DE JÉSUS ET SUR SON ENSEIGNEMENT. On lit le texte de l’AT en fonction de le vie de Jésus (Ac 8, 26-40; Lc 4, 17-21). Pour l’exposition parénétique on se sert d’un logion de Jésus (Ga 5, 1-6, 10); 2 P 2, 11-12; 2, 13-3, 22.
3. Le cadre missionnaire: on y développe l’apologétique chrétienne qui se dirige sur deux front: juif et païen. Opposition au groupe de Juifs qui rejettent la messianité de Jésus (Ac 7; Jn 9, 22; Ga 3, 1-4-31; He 1, 1-2; 5-13) ou aux païens (Rm 1, 18-32) en présentant Jésus comme le Messie en qui Dieu sauve tout homme (Ac 5, 12)
Les chrétiens se servent de modèle des controverses de Jésus avec les Juifs (Jn 9; Mc 2; Mt 22-23; Lc 15). Tous les matériaux élaborés dans ces trois cadres sont très tôt organisés en récits et collections écrites des logia, des miracles et des événements de la vie de Jésus. Ces recueils ont été à la base de la formation de nos Évangiles. Ainsi les exégètes cherchent à identifier les éléments rédactionnels qui situent les logia dans le contexte de la communauté.
L’exégète doit toujours tenir en compte que la spécificité des genres littéraires bibliques est leur finalité essentiellement religieuse. Il est indispensable d’interpréter chaque genre littéraire selon ses règles et ses conventions. Ces genres sont pris dans les genres littéraire de l’époque, mais ils sont utilisés avec une certaine liberté.
VI. Différentes approches de lecture du Nouveau Testament
VI.1. Méthode historico-critique
Le document de la Commission Biblique Pontificale affirme que la méthode historico-critique est la méthode indispensable pour l’étude scientifique du sens des textes anciens, puisque la « Parole de Dieu en langue d’homme » a été composée par des auteurs humains([21]). Cette méthode s’applique à travers les étapes suivantes:
1. La critique textuelle part du témoignage des manuscrits les plus anciens et les meilleurs, celui des Papyrus, des traductions anciennes et de la patristique, pour essayer d’établir un texte biblique qui soit aussi proche que possible du texte original. Vient ensuite une analyse linguistique (morphologie et syntaxe) et sémantique, qui utilise les connaissances obtenues dans la philologie historique.
2. La critique littéraire s’efforce à discerner le début et la fin des unités textuelles et vérifier la cohérence interne des textes.
3. La critique des genres cherche à déterminer les genres littéraires, leurs milieux d’origine, leurs traits spécifiques et leur évolution.
4. La critique des traditions situe les textes dans les courants de tradition. Elle cherche à en préciser l’évolution au cours de l’histoire.
5. Enfin, la critique de la rédaction étudie les modifications que les textes ont subies avant d’être fixés dans leur état final; elle analyse cet état final, en s’efforçant de discerner les orientations qui lui sont propres. C’est la phase synchronique (cf. diachronique): on y explique le texte en lui-même grâce aux relations mutuelles de ses divers élément et en le considérant sous son aspect de message communiqué par l’auteur à ses contemporains. La fonction pragmatique du texte peut alors être prise en considération.
Les limites de cette méthode se font sentir dans son usage classique: « la recherche du sens du texte biblique dans les circonstances historiques de sa production … ne s’intéresse pas aux autres potentialités de sens qui se sont manifestées au cours des époques postérieures de la révélation biblique et historique de l’Église([22]) ». Le but de la méthode historico-critique étant de mettre en lumière, de façon surtout diachronique, les sens exprimés par les auteurs et rédacteurs, avec d’autres méthodes et approches, elle ouvre au lecteur moderne l’accès à la signification du texte de la Bible, tel que nous l’avons([23]). La Bible est tellement riche qu’aucune méthode scientifique n’en épuise le contenu. Actuellement beaucoup d’autres méthodes et approches sont proposées.
VI .2. Nouvelles méthodes d’analyse littéraire
1. L’analyse rhétorique accorde une attention à la présence de la rhétorique dans l’Écriture. On en distingue trois approches: la rhétorique classique gréco-latine, les procédés sémitiques de composition et en fin, les recherches modernes qu’on appelle » nouvelle rhétorique. La rhétorique est l’art de composer des discours persuasifs. Appliquée à la Bible, la nouvelle rhétorique » veut pénétrer au cœur du langage de la révélation en tant que langage religieux persuasif et mesurer son impact dans le contexte social de la communication (cf. les rôles de la Bible dans la vie sociale et spirituelle, cours d’Introduction à l’AT). Les méthodes rhétoriques ont aussi leurs limites. Est-ce que les auteurs bibliques maîtrisaient les règles de la rhétorique? Si oui, la quelle? Chaque texte biblique doit être considéré dans ses particularités.
2. L’analyse narrative propose une méthode de compréhension et de communication du message biblique qui corresponde à la forme de récit et de témoignage, modalité fondamentale de la communication humaine, caractéristique aussi de l’Écriture Sainte. Si la méthode historico-critique considère le texte biblique comme une « fenêtre » permettant d’observer telle époque, l’analyse narrative « souligne que le texte fonctionne également comme un « miroir » , en ce sens qu’il met en place une certaine image de monde… qui exerce son influence sur les façons de voir du lecteur et porte celui-ci à adopter certaines valeurs plutôt que d’autres »([24]). Cette méthode a l’avantage car beaucoup de textes bibliques ont un caractère narratif, « mais on ne peut pas considérer l’efficacité existentielle subjective de la Parole de Dieu transmise narrativement comme un critère suffisant de la vérité de sa compréhension »([25]).
3. L’analyse sémiotique qui repose sur trois principes (immanence – structure du sens -la grammaire du texte) et analyse le texte sur trois niveaux: au niveau narratif, on précise les rapports entre les rôles remplis par des actants qui déterminent les états et produisent les transformations; au niveau discursif, on repère les figures, c-à-d les éléments de signification d’un texte (acteurs, temps et lieux). Cette méthode ne peut donner de bon résultat sur l’étude de la Bible que si on la débarrasse de certains présupposés de la philosophie structuraliste qui nie le sujet et la référence extra-textuelle. L’approche sémiotique doit s’ouvrir à l’histoire: celle des acteurs des textes d’abord; celle de leurs auteurs et de leurs lecteurs ensuite; sinon on reste à une étude formelle du contenu du texte sans en dégager le message.
V. 3. Approches basées sur la Tradition
La Bible ne se présente pas comme un assemblage de textes dépourvus de relations entre eux, mais comme un ensemble de témoignages d’une même grande Tradition. Les exégètes doivent mener à bien une tâche théologique d’interprétation, en partant du cadre explicite de la foi: la Bible dans son ensemble.
1. L’approche canonique veut qu’on interprète chaque texte biblique à la lumière du Canon des Écritures, c’est à-dire de la Bible en tant que reçue comme norme de foi par une communauté de croyants. Situer chaque texte dans l’unique dessein de Dieu pour aboutir à une actualisation de l’Écriture pour notre temps. Elle souhaite compléter la méthode historico-critique. Le problème est la présence de deux Canon des Écritures (juif et chrétien). Lequel suivre? L’ÉGLISE doit lire l’Ancien Testament à la lumière de Pâque.
2. L’approche par le recours aux traditions juives d’interprétation tient compte du fait que l’Ancien Testament a pris sa forme finale dans le Judaïsme des 4 ou 5 derniers siècles qui ont précédé l’ère chrétienne, et que le même Judaïsme a été le milieu d’origine du Nouveau Testament et de l’Église naissante. L’interprétation de la Bible avait déjà commencé dans la Septante (traduction grecque de la Bible), dans les Targumîm, dans les Inertestamentaires, dans les Midrashîm. Même au sein de la Bible, les livres des Chroniques interprètent les livres des Rois. La diversité des formes (paraboles, allégories, antologies et centons, relectures, pesher, rapprochements entre textes éloignés, psaumes et hymnes, visions, révélations et songes, compositions sapientielles) est commune à l’AT et au NT ainsi qu’à la littérature de tous les milieux juifs avant et après le temps de Jésus. Mais il faut noter que le Judaïsme ancien était diversifié. Il convient de situer chronologiquement les textes juifs avant de les comparer à ceux du Nouveau Testament. En plus le contexte d’interprétation est différent: du côté juif, il s’agit d’une religion qui définit un peuple et une pratique de vie, tandis que du côté chrétien, c’est la foi au Seigneur Jésus, qui rassemble une communauté.
3. L’approche par l’histoire des effets du texte: elle repose sur deux principes: a) un texte ne devient une œuvre littéraire que s’il rencontre des lecteurs qui lui donnent vie en se l’appropriant; b) cette appropriation du texte peut s’effectuer de façon individuelle ou communautaire et prendre forme en différents domaines (littéraires, artistiques, théologique, ascétique et mystique). Cette méthode montre sa fécondité, mais aussi l’histoire atteste l’existence de courants d’interprétations tendancieuses et fausses, aux effets néfastes, par exemple, à l’antisémitisme, à l’apparteid ou à d’autres discriminations raciales ou à des illusions millénaristes.
VI. 4. Approches par les sciences humaines.
Elles partent du principe selon lequel la Parole de Dieu a pris racine dans la vie de groupes humains (cf.Si 24, 12) et elle s’est frayé un chemin à travers les conditionnements psychologiques des diverses personnes qui ont composé les écrits bibliques. Donc certaines sciences humaines comme la sociologie, l’anthropologie et la psychologie peuvent contribuer à une meilleurs compréhension de certains aspects des textes.
1. Approche sociologique. Un exemple: L’étude de normes de comportement dans l’Ancien-Orient et en Israël peut contribuer plus à l’intelligence du Décalogue que les tentatives purement littéraires de reconstruction du texte primitif. Le problème: malgré son apport à la critique historique, l’approche sociologique ne suffit pas pour deux raisons: a) les textes bibliques et extrabibliques ne fournissent pas forcément une documentation suffisante pour donner une vue d’ensemble de la société de l’époque; b) cette méthode tend à accorder aux aspects économiques et institutionnels de l’existence humaine plus d’attention qu’à ses dimension speersonnelles et religieuses.
2. Approche par l’anthropologie culturelle. En général, l’anthropologie culturelle cherche à définir les caractéristiques des différents types d’hommes dans leur milieu social, comme par exemple l’homme méditerranéen, l’homme africain bantu. On doit prendre en considération certains facteurs: étude du milieu: milieu urbain ou rural?
– attention aux valeurs reconnues par la société:
– honneur et déshonneur, secret, fidélité, tradition, genre d’éducation et école
– la façon dont s’exerce le contrôle social;
– les idées sur la famille, la parenté, la famille, la maison, la situation sociale de la femme
les binômes institutionnels ( patron – client; esclave – libre
-la conception du sacré et du profane
Cette approche permet de mieux distinguer les éléments permanents du message biblique qui ont leur fondement dans la nature humaine, et les déterminations contingentes, dues à des cultures particulières, mais elle n’est pas à mesure de rendre compte des apports spécifique de la Révélation.
3. Approches psychologiques et psychanalytiques. Les textes bibliques sont considérés comme expérience de vie et règles de comportement. La religion étant toujours dans une situation de débat avec l’inconscient, elle participe à la correcte orientation des pulsions humaines. Utiles pour préciser l’étendue de la responsabilité humaine, la psychologie et la psychanalyse ne doivent pas éliminer la réalité du péché et du salut, ni confondre religiosité spontanée et révélation biblique. Elles doivent respecter le caractère historique du message de la Bible
VI.5.Approches contextuelles
Cette approche tient compte de la mentalités et des préoccupations des lecteurs du texte. Actuellement on assiste à une nouvelle manière de lire la Bible. Partir de la vie à la Bible et de la Bible à la vie, pour chercher réponse aux préoccupations sociales de notre époque.
1. Approche libérationiste. Au lieu de se contenter d’une interprétation objectivante, qui se concentre sur ce que dit le texte situé dans son contexte d’origine, on cherche une lecture qui naisse de la situation vécue par le peuple. Dans la foi, l’Écriture se transforme en facteur de dynamisme de libération intégrale. Cette approche part du principe selon lequel Dieu est présent dans l’histoire de son peuple pour le sauver; il ne peut tolérer l’oppression ni l’injustice.
2. Approche féministe. Née aux États-Unis, dans le contexte socio-culturel de la lutte pour le droit de la femme, à savoir la libération de la femme et la conquête de droits égaux à ceux de l’homme, elle se présente sous trois formes:
a) la forme radicale qui refuse complètement l’autorité de la Bible, car pensent les féministes que la Bible a été produite par les hommes pour assurer la domination de l’homme sur la femme (androcentrisme);
b) la formenéo-orthodoxe accepte la Bible comme prophétique et susceptible de servir, dans la mesure où elle prend parti pour les faibles et donc pour la femme;
c) la forme critique utilise une méthodologie subtile et cherche à découvrir la position et le rôle de la femme dans le mouvement de Jésus et dans les Églises pauliniennes. L’égalitarisme de l’époque aurait été masquée dans les écrits du NT et par la suite le patriarcalisme et l’androcentrisme auraient progressivement prévalu.
L’exégèse féministe a aidé à la compréhension de l’image de Dieu dans l’Ancien Testament. Il n’est pas la projection d’une mentalité patriarcale. Il est un Père, mais aussi Dieu de tendresse et d’amour maternels (cf. Os 11; Is 49, 15).
Dans la mesure où cette exégèse se fonde sur un parti pris, elle s’expose à interpréter les textes bibliques de façon tendancieuse et donc contestable. Du pont de vue méthodologique elle recourt souvent aux arguments ex silentio pour imaginer une situation historique hypothétique. La lutte qu’elle prône ne peut être utile à l’Église que dans la mesure où les féministes ne tombent pas dans le piège qu’il dénonce. C’est le risque de ne plus considérer le pouvoir comme service.
VI.5.3. L’approche africaine
Dans son article, P. Poucouta [cfr NRT 120 (1998), 32-45], montre pourquoi le jésuite Mveng Engelbert est le père de la lecture africaine de la Bible. Celui-ci considère la Bible non seulement comme un héritage juif mais aussi un héritage africain. Elle est source de vie et de libération pour l’Afrique, contrairement à ce que une histoire récente des effets du texte faisait croire en Afrique du Sud.
Au Congrès de Jérusalem en 1972 sur la « Bible et l’Afrique Noire », le Père Mveng corrigea l’image que certains biblistes se faisaient du noir sous l’influence d’une interprétation tendancieuse sur les fils de Cham en Gn 9,18-27; 10,6-8.
Nous sommes venus apprendre l’Ecriture Sainte, le message de la Bible, parce que l’Afrique est la Terre de la Bible et que le second fleuve du Paradis s’appelle Géon et qu’il entoure le pays de Kush, c’est-à-dire l’Afrique Noire. Depuis la Genèse, l’Afrique et les Africains noirs sont présents dans la Bible : le message de la Bible est notre message et le Peuple de la Bible est notre Peuple. Nous aussi nous sommes les héritiers de la Bible et responsable de son message hier, aujourd’hui et demain. Nous sommes venus apprendre à déchiffrer ce message qui est notre message comme il est le vôtre.([26])
Par le recensement des « textes bibliques où il est question des Kushites et de Kush, que la LXX traduit systématiquement par Aetiopia, il montre que Kush désigne, et cela est confirmé par les historiens antiques, d’abord le royaume de Nubie au Sud de l’Egypte, et par extension l’Afrique Noire, ce qui comprend aussi les habitants basanés de la péninsule arabique »([27])
Les préjugés portés contre les Noirs proviennent d’une exégèse allégorique des Pères considérant le pays de Kush comme le symbole des ténèbres, du péché et par conséquent de la malédiction. Ces interprétations sont passées dans la tradition chrétienne sont postérieures à la Bible. Elles ont donné naissance au mythe de Cham, race maudite, lequel n’a pas de fondement biblique. Au contraire, dans l’Ancien Testament, les Kushites apparaissent comme un peuple puissant (2 Ch 12,2-4) : « ses soldats, son armée, ses chars, ses richesses, la confiance que les peuples environnants placent en lui font du peuple kushite une des grandes puissances de l’antiquité ».([28])
D’autres exégètes, notamment Origène, soutiennent une portée mystico-biblique du pays et des habitants de Kush. La femme Kushite de Moïse (Nb 12,1) sera considérée comme symbole de l’humanité à qui Dieu envoie sa révélation par Moïse. La Sunamite du Cantique des Cantiques représente les païens qui deviennent l’Eglise, la reine de Saba symbolise l’Eglise qui vient à la rencontre du Christ, tandis que le nègre Ebed-Melekh (Jr 38,7-13), qui retire Jérémie du puits, la foi des peuples païens en la résurrection.
Le message de la Bible nous apparaît sous un éclairage nouveau. Il appartient en tout premier lieu à l’héritage culturel et spirituel des peuples Noirs. Dieu s’adresse, de façon privilégiée, à ces peuples, parce qu’ils symbolisent, dans leur foi, mais sans doute aussi dans le destin douloureux d’agneaux immolés au péché du monde, la grande espérance de l’homme interpellé par Dieu, tiré de son néant et appelé à l’héritage des enfants de Dieu.([29])
Mveng découvre qu’il faut sortir de l’ignorance pour retrouver le vrai destin des peuples noirs. Il montre la fausseté du mythe de Cham dans un de ses poèmes :
On m’avait dit que ma race chassée de ta présence devait fuir,
Et j’ai fui avec Caïn, sans trop savoir pourquoi,
Car je n’étais pas Caïn et ma tribu n’était pas liée par aucun pacte à la tribu de ses fils,
Et de Cham mes ancêtres ignoraient jusqu’à l’ignoble légende.([30])
D’autres exégètes considèrent la place du Noir dans la Bible avec objectivité. Selon le P. de Meester, le Passage des Actes 8 sur la conversion de l’éthiopien montre que l’homme noir a reçu le baptême avant le Romain et que l’Afrique a reconnu le Christ avant l’Europe.
Le Burkinabè Sidbe Semporé considère l’exode de Falashas et des Falashamouras vers Israël comme un retour aux racines bibliques de l’existence et de la place de Kush et des kushites dans l’histoire du salut. Etant donné que la Septante, la Vulgate et les anciens commentateurs juifs et chrétiens sur Nb 12,1, identifie la Kushite de Moïse avec une femme originaire de la corne de l’Afrique et que dans la famille de Moïse, un de ses petits neveux était appelé Pinhas, c’est-à-dire le nègre, on peut conclure que les peuples noirs étaient associés comme témoins et partenaires à l’Alliance et à la Torah.([31])
En conclusion, le Père Mveng interpelle le bibliste africain. La mission de ce dernier n’est pas seulement de faire l’archéologie de la Parole de Dieu pour découvrir que le message biblique est un héritage non seulement israélien mais aussi africain. Il faut plutôt se servir de cette redécouverte pour pénétrer la parole dynamique et dynamisante de la Bible.
VI.6. Lecture fondamentaliste de la Bible
1.Définition: Lecture qui part du principe que la Bible, étant Parole de Dieu inspirée et exempte d’erreur, doit être lue et interprétée littéralement en tous ses détails. Elle exclut tout effort de compréhension de la Bible qui tienne compte de sa croissance historique et de son développement. Elle tend à traiter le texte biblique comme s’il avait été dictée mot à mot par l’Esprit et n’arrive pas à reconnaître que la Parole de Dieu a été formulée dans un langage et une phraséologie conditionnés par telle ou telle époque. Elle n’accepte aucune attention aux formes littéraires et aux façons humaines de penser dans les textes bibliques.
Problème: Refusant de tenir compte du caractère historique de la révélation biblique, la lecture fondamentaliste se rend incapable d’accepter pleinement la vérité de l’Incarnation elle-même. Le fondamentalisme fuit l’étroite relation du divin et de l’humain dans les rapports avec Dieu. Il refuse d’admettre que la Parole de Dieu inspirée a été exprimée en langage humain et qu’elle a été rédigée, sous l’inspiration divine, par des auteurs humains dont les capacités et les ressources étaient limitées. Il tient pour conforme à la réalité une cosmologie ancienne périmée, parce qu’on la trouve exprimée dans la Bible. Il empêche de poser la question des rapports entre la culture et la foi. Sa lecture non-critique de certains textes de la Bible confirme des idées politiques et des attitudes sociales marquées par des préjugés, racistes par exemple contraires à l’évangile chrétien. Il refuse de reconnaître que l’existence de l’Église a précédé le texte du Nouveau Testament qui est une sorte de syhnthèse de la Tradition guidée par l’Esprit qui a soutenu le développement d’une communauté de foi.
L’approche fondamentaliste est dangereuse, car non réaliste. Elle attire les personnes qui cherchent des réponses bibliques à leurs problème de vie, mais elle les dupe car elle ne leur dit pas que la Bible ne contient pas nécessirement une réponse immédiate à chacun de ces problèmes. Le fondamentalisme invite, sans le dire, à une sorte de suicide de la pensée. Il met dans la vie une fausse certitude, car il confond inconsciemment les limites humaines du message biblique avec la substance divine de ce message.
Le fondamentaliste ignore la lente pédagogie divine qui se mettait à la hauteur de la connaissance et des ressources de l’homme biblique. Un exemple de pédagogie: quand j’étai petit, je voyais comment les mamans, qui sont parfois des pychologues par nature, pour satisfaire l’instint vengeur de l’enfant qui venait de tomber en glissant, permettaient à ce dernier de tapper le sol sur lequel il a glissé ou l’arbre qu’il a congné par mégarde. Et le petit se calmait car il se rend compte que sa maman l’avait défendu.
VI.7. Questions d’hermeneutique sur l’interprétation de la Bible (NT)
Le principe de la pédagogie divine, ou humaine évoquée plus haut, montre que le lecteur de la Bible doit tenir compte de l’hermeneuttique philosophique contemporaine qui a mis en évidence l’implication de la subjectivité dans la connaissance, spécialement dans la connaissance historique.
Au niveau philosophique quelques auteurs ont approfondi la théorie herméneutique contemporaine et ses applications à l’Écriture. Parmi eux, on peut énumumérer Bultmann, Hans Gorg, Gadamer et Paul Ricœur. La Parole de Dieu ne trouve pleinement son sens qu’en refoignant ceux auxquels elle s’adresse([32]). Là on rejoint le diacre syrien, Ephrem, qui disait que la Parole de Dieu de Dieu a plusieurs sens à découvrir progressivement (Comm.Diatessaron I, 18). Donc la Parole de Dieu ne cessera de nous dévoiler sa richesse jusqu’à la lecture faite par le dernier homme qui vivra sur cette terre.
1. Perspectives modernes
– Pour Bultmann, il faut une précompréhension à toute compréhension. On ne comprend les écrits du Nouveau Testament sans se les approprier: interprétation existentielle.
– Pour Heidegger, l’exégèse d’un texte biblique n’est pas possible sans des présupposés qui dirigent la compréhension. La compréhension est fondée sur un rapport vital de l’interprète à la chose dont parle le texte. Toutefois la compréhension doit être enrichie, modifiée et corrigée par ce dont parle le texte.
– Pour Gadmer, la compréhension s’opère dans la fusion des horizons différents du texte et de son lecteur. Elle n’est possible que s’il y a une appartenance, c’et-à-dire une affinité fondamentale entre l’interprète et son objet. La compréhension d’un texte est toujours une compréhension plus large de soi.
– Pour Paul Ricœur, il y a deux distances:
a) entre le texte et son auteur, car une fois produit le texte prend une certaine autonomie, il commence une carrière de sens;
b) une autre entre le texte et ses lecteurs successifs; ceux-i doivent respecter le texte dans son altérité. Il afffirme que le langage religieux de la Bible est un langage symbolique qui « donne à penser », un langage dont on ne cesse de découvrir les richesses de sens, un langage qui vise une réalité transcendante et qui, en même temps, éveille la personne humaine à la dimension profonde de son être.
2. Utilité de l’exégèse
L’exégèse aide à franchir la distance entre le temps des auteurs et premiers destinataires des textes bibliques et notre époque contemporaine, de façon à actualiser correctement le message des textes pour nourrir la vie de la foi des chrétiens. La nécessité d’une herméneutique trouve son fondement dans la Bible elle-même et dans l’histoire de son interprétation, car l’ensemble des écrits de l’Ancien et du Nouveau Testament sont un long processus de réinterprétation des événements fondateurs, en lien avec des communautés de croyants. En plus, les événements rapportés dans la Bible sont des événements interprétés.
3° Limites des théories herméneutiques
Certaines théories sont inadéquates, comme celle de Bultmann, qui par suite d’une excessive démythologisation, vide la Bible de sa réalité objective et subordonne le message biblique au message anthropologique. Toute interprétation doit être au service d’une compréhension de la personne et de l’histoire de Jésus-Christ. L’honnêteté intellectuelle et épistémologique oblige à reconnaître que le recit des événements du salut ne peut être compris par la seule raison. Il faut des présupposés telle la foi vécue dans une communauté ecclésiale et la lumière de l’Esprit. Plus on grandit dans la vie de l’Esprit plus on acquiert l’intelligence des Écritures. Faire l’exégèse sans la foi, c’est limiter l’exégèse à la critique textuelle ou à l’histoire des réligions.
VI.8. Sens de l’Écriture inspirée
1° Sens littéral
Il est indispensable de trouver les sens précis des textes tels qu’ils ont été produits par leurs auteurs, sens qu’on appelle « littéral ». Mais il ne faut pas confondre le sens « littéral » et le sens « littéraliste » auquel s’attachent les fondamentalistes. Il ne faut pas traduire mot par mot pour trouver le sens littéral. Il faut connaître les conventions littéraires du temps. Exemple: Le sens littéral de la phrase: « Ayez la ceinture aux reins » (Lc 22, 35), correspond à l’emploi métaphorique des termes: « Ayez une attitude de disponibilité ». Parfois une seule expression peut désigner plusieurs réalités. Le quatrième évangile en fournit plusieurs exemples (Jn 11, 50: exprime un calcul politique immoral et une révélation divine qui appartiennent tous les deux au sens littéral, car mis en évidence par le contexte.
Il convient aussi d’être attentif à l’aspect dynamique de beaucoup de textes. Exemple: Dans les Psaumes royaux en parlant du roi, le psalmiste évoquait à la fois une institution réelle et une vision idéale de la royauté, conforme au dessein de Dieu, de sorte que son texte dépassait l’institution royale telle qu’elle s’était manifestée dans l’histoire.
2° Sens spirituel
L’événement pascal a mis en place un contexte historique radicalement nouveau qui éclaire des textes anciens et leur fait subir une mutation de sens. Les textes qui étaient considérés comme des hyperboles (par ex. l’oracle où Dieu, parlant d’un fils de David, promettait d’affermir « pour toujours » son trône: 2 S 7, 12-13; 1 Ch 17, 11-14), doivent désormais être pris à la lettre, parce que » le Christ, étant ressuscité des morts, ne meurt plus » (Rm 6, 9). On peut alors dire que le Christ règne pour toujours, mais non sur le trône terrestre de David (Ps 2, 7-8; 110, 1.4.). Donc le sens spirituel est , selon la foi chrétienne, le sens exprimé par les textes bibliques, lorsqu’on les lit sous l’influence de l’Esprit Saint dans le contexte du mystère pascal du Christ et de la vie nouvelle qui en résulte. Par conséquent, lorsqu’un texte biblique se rapporte directement au mystère pascal du Christ ou à la vie nouvelle qui en résulte, son sens littéral est un sens spirituel.
Un des aspects possibles du sens spirituel est l’aspect typologique. Il appartient aux réalités exprimées par l’Écriture: Adam figure du Christ (Rm 5, 14); le déluge figure du baptême (1 P 3, 20-21).
3° Sens plénier
On définit le sens plénier comme un sens plus profond du texte, voulu par Dieu, mais non clairement exprimé par l’auteur humain. On le découvre par l’étude d’un texte à la lumière d’autres textes bibliques qui l’utilisent ou dans son rapport avec le développement de la révélation. Par ex., le contexte de Mt 1, 23 donne un sens plénier à l’oracle d’Is 7, 14, en utilisant la traduction de la Septante: « la vierge concevera ».
On peut considérer le sens plénier comme une autre manière de désigner le sens spirituel, dans le cas où le sens spirituel se distingue du sens littéral:
« L’Esprit Saint, auteur principal de la Bible, peut guider l’auteur humain dans le choix de ses expressions de telle sorte que celle-ci expriment une vérité dont il ne perçoit pas toute la profondeur. Celle-ci est plus complètement révélée dans la suite des temps, grâce, d’une part, à des réalisations divines ultérieures qui manifestent mieux la portée des textes et grâce aussi, d’autre part, à l’insertion des textes dans le canon des Écritures. Ainsi est constitué un nouveau contexte, qui fait apparaître des potentialités de sens que le contexte primitif laissait dans l’obscurité »([33]).
Toutes ces approches sont utiles et présentent chacune des limites pour atteindre le sens plénier du texte biblique. La méthode historico-critique nous aide à découvrir le sens littéral, mais seule, elle ne suffirait pas à découvrir toute les potentialités de sens que contient la Parole de Dieu.
LE MILIEU DU NOUVEAU TESTAMENT
VII.3.3. Tension entre Rome et population juive sous Ponce Pilate
Caligula, passant outre le privilège juif, ordonne de dresser sa statue au Temple de Jérusalem. Pétronius, gouverneur de Syrie, réussit à reporter l’exécution de cet ordre jusqu’à ce que le successeur de Caligula Claude, l’eut abrogé. Certains passage du NT font penser à cet événement (2 Th 2, 3; Mc 13, 14). De 41 à 44, Hérode Agrippa I obtint de nouveau une plus grande autonomie d’Israël-Palestine. C’est lui qui fit décapiter l’Apôtre Jacques, frère de Jean (Jacques le Majeur) avant Pâque 43. Ce persécuteur des chrétiens fut mort brusquement à Césarée (Ac 12). Après sa mort, tout le pays passe sous la juridiction des procurateurs romains. Zélotes et Sicaires s’acharnent contre les romains; d’où le souèvement général de 66. Après un combat dur de plus trois ans, les insurgés sont vaincu et le Temple de Jérusalem est détruit le 29 août 70. Israël-Palestine devient une province romaine normale, sous le nom de Palestine, avec marge étroite pour un reste d’administration autonome. Ces événéments seront suivis d’une réforme systématique du Judaïsme sous les Paharisiens dont Rabbi Yohanna ben Zakaï. Durant cette période, le canon de l’Ancien Testament est fixé et les données de la Tradition orale juive sont rassemblées poir le mettre par écrit. Matthieu, qui écrit après 70, montre que les Pharisiens sont le représentants de la religion juive, même s’il sait que les Sadducéens ont joué un grand rôle pendant le temps de Jésus.
VII.4. Données géographiques sur Israël-Palestine
Pour situer les déplacements effectués par Jésus d’après les Evangiles, il nous faut connaître quelque chose sur les différentes régions de son pays:
a) La Galilée
– appartient à la Syrie sous les Séleucides (200-142)
– rejudaïsé sous les Hasmonéens (142-63)
– au temps de Jésus, Hérode Antipas y règne
b) La Pérée
– à l’Est du Jourdain, au nord la Décapole y est attaché administrativement, mais aux yeux des Juifs c’était un pays païens.
c) La Samarie
– séjours des Samaritains qui s’étaient séparés d’autres juifs(2R 17, 24-41; Lc 9, 53; Jn 4, 9; Mt 10, 5), avec leur propre sanctuaire sur le Mont Garizim (cf. Jn 4, 21). La capitale Samarie sera reconstruite par Hérode comme ville hellénistique sous le nom de Sebaste. Après sa mort, son fils Arhélaüs y règna. En 6 ap. J.C., la Samarie devint aussi province romaine en même temps que la Judée.
d) La Judée
– ayant Jérusalem pour capitale, elle le centre d’Israël-Palestine.
e) L’Idumée, ancien Edom
– faite région juive par les Hasmonéens. La famille d’Hérode le Grand était originaire de cette contrée.
VII.6. Le Judaïsme
VII.6.1. Généralités et notion de Dieu
Au temps de Jésus le judaïsme ne présente pas un visage monolithique. Le Pentateuque est certes considéré comme le fondement de la religion en général, mais son interprétation est objet de discussions. Par ailleurs les frontières du canon sont encore fluctuantes. Les seuls énoncés théologiques qui s’imposent s’expriment dans l’affirmation que Dieu est Un et qu’il s’est choisi Israël comme son peuple. Cette unité indissoluble entre le peuple et la religion est la caractéristique principale du judaïsme. Quiconque prend ses distances par rapport à l’histoire d’Israël et de son appartenance à ce peuple n’est plus un Juif. Quiconque par contre adhère au judaïsme comme prosélyte est considéré (avec pourtant quelques réserves) comme membre du peuple juif.
Ce qui caractérise le judaïsme à l’époque néotestamentaire c’est son expansion mondiale et sa répartition en différents groupes.
Géographiquement on peut distinguer entre le judaïsme de Palestine, parlant généralement l’araméen et le judaïsme de la Diaspora. Il y a en outre une importante Diaspora de langue araméenne en Mésopotamie (Babylone).
Du point de vue culturel tout le peuple est réparti en quatre groupes : les prêtres, les lévites, les « Israélites », les Prosélytes. Du point de vue de la formation théologique on distingue entre les scribes et les laïcs. On en trouve un écho dans le N.T.
sA l’intérieur du judaïsme il y a différents groupes religieux (ou « partis ») : les pharisiens, les saduccéens, les zélotes. Esséniens et Samaritains constituent deux cas à part. Ces groupes soutiennent des positions différentes non seulement à propos de questions politiques mais aussi au sujet de questions théologiques fondamentales.
Les deux piliers de la religion sont :
la foi en Dieu, le Créateur, qui a choisi Israël comme son peule et le sauvera un jour.
L’obéissance à la Loi, Charte de l’Alliance entre Dieu et Israël. Cette obéissance stricte concerne le culte et le comportement dans la vie quotidienne, avec cependant une souplesse assez importante dans l’interprétation.
Le signe visible de l’unité du judaïsme, et en même temps son unique lieu de culte sacrificiel, c’est le Temple de Jérusalem. Si donc les Samaritains ont leur propre temple, cela signifie qu’ils se sont séparés du judaïsme.
N.B. Entre 170 avant J.C. et 71 après J.C. il y avait à Léontopolis (Egypte) un autre temple juif, fondé par le grand-prêtre Onias qui s’était enfui de Jérusalem. Ce temple n’était pas considéré comme illégal, mais n’a pas eu de grande signification au-delà de son environnement immédiat.
Certains thèmes de la Théologie engendraient des positions variées voire même opposées. L’eschatologie par exemple n’est pas l’objet d’un enseignement bien ferme. Les Sadducéens rejettent l’eschatologie de style apocalyptique et toute métaphysique se situant au-delà de la foi en Dieu (cf. Ac 23,8), alors que les Pharisiens et d’autres enseignent la résurrection des morts. Chez ces derniers se développe la tendance à souligner la croyance en l’au-delà. Ils soulignent toujours plus fortement la transcendance de Dieu, d’un Dieu toujours plus éloigné de ce monde. Aussi éprouve-t-on le besoin de concevoir des intermédiaires entre ce Dieu lointain et ce bas-monde, et l’on attribue des fonctions appropriées à des anges et à des hypostases.
VII.6.2. La Loi
La Loi était le centre de la vie et de la pensée juive. On pense d’habitude que l’observance de la Loi était ressentie par les Juifs comme un joug pesant et à peine supportable. Mais ce jugement est inadéquat : parmi les 613 prescription et interdictions, plusieurs étaient depuis longtemps passées dans les mœurs habituelles.
Il ne faut pas comprendre de travers l’obéissance juive à la Loi: il ne s’agit pas d’une obéissance formelle, mais d’une attitude qui donne un sens à cette obéissance. L’accent n’est pas mis sur les performances de l’homme, il s’agit bien plus de l’esprit dans lequel on obéit. Même si l’on observe les commandements dans l’espoir d’une récompense il n’est pas permis de faire un usage intéressé de la Loi.Celle-ci ne pousse pas à un formalisme extérieur et elle n’est pas considérée par le Juif comme un fardeau (bien que ce soit là le point de vue du pagano-chrétien Luc, (cf. Ac 15,10). Le Juif pieux est fier de la Loi et de sa capacité à l’observer (Ph 3,2ss). Il ne s’agit donc pas d’une obéissance mécanique et la motivation profonde n’est pas en premier lieu la peur de Dieu mais la reconnaissance de sa gloire, l’amour de Dieu. Car lorsque l’homme désobéit à la volonté de Dieu, il prend conscience de sa condition de pécheur et se sent à la merci du pardon divin. L’obéissance mène donc à l’humilité. Les débats entre rabbins sur la juste interprétation de la Loi caractérisent bien le style de l’activité théologique d’alors. Au temps de Jésus et du christianisme primitif s’affrontent les écoles de Shammaï et de Hillel. Le premier était pour une interprétation stricte de la Loi, le second pour une interprétation plus modérée. D’après Ac 22,3, Paul était disciple de Gamaliel, de l’école de Hillel.
Comme la volonté de Dieu, telle qu’elle est exprimée dans la Loi, est une, des Rabbins parviennent à résumer cette Loi en une seule phrase : « Ce qui t’est désagréable, ne le fais à personne d’autre; c’est là toute la Tora et le reste en est l’explication; va et apprends ». Cette « règle d’or » se trouve également dans le N.T. (Mt 7,12). Cependant, concrètement – mais non formellement – il y a une différence : alors que le commandement de l’amour, dans le N.T., doit supprimer la casuistique, celle-ci en sort renforcée dans la tradition rabbinique. La question « Qui est mon prochain », posée à propos de l’amour, y trouve une réponse qui relève de la casuistique et non, comme chez Jésus, par la référence à une situation concrète (cf Lc 10,30-37).
Particulièrement important était le débat sur l’interprétation correcte du précepte relatif au sabbat, débat qui se répercute également dans le N.T. (cf Mc 3,1-6). A l’origine le sabbat était un jour de repos; c’est progressivement qu’il est devenu une journée consacrée à la participation à la liturgie syngogale. Chez les scribes le précepte du repos sabbatique devint l’objet d’une casuistique complexe. Le précepte fut interprété comme une interdiction absolue d’accomplir quelque tâche que ce soit. Le traité schabbat récapitule ce qui était permis et ce qui était prohibé. Ce qui est sans doute à l’origine de la critique des juifs à l’adresse de Jésus, c’est que celui-ci dans certains cas particuliers violait les interdictions concernant le sabbat. Il est vrai que d’après la doctrine juive la Loi avait besoin d’une explication, d’une interprétation en vue de son application était toujours d’un caractère casuistique, car l’obéissance devait être pratiquée avec le maximum de précision. C’est pour remplir cette tâche que s’est développé l’ordre des scribes.
Un thème fondamental de discussion théologique, c’était la question de savoir quelle importance attribuer à la Tradition des Scribes. Contrairement aux Pharisiens, les Sadducéens n’étaient pas disposés à reconnaître, outre la Loi, son interprétation par les scribes. Eux aussi certes expliquaient la Loi, mais leur doctrine n’accordait pas à cette explication une valeur normative. Les énoncés de Mt 23, dirigés contre les seuls Pharisiens, reflètent déjà la situation après 70, où l’interprétation pharisienne de la Loi avait seule encore cours.
On peut dire que judaïsme, dans son ensemble, était une religion toute basée sur la Loi. Celle-ci était pour le Juif le signe par excellence de l’Alliance de Dieu avec Israël. Elle fondait en outre son espérance d’une restauration de son peuple comme Etat. Elle empêcha aussi Israël de se dissoudre parmi les autres peuples, car elle les en séparait par une barrière faite de la circoncision, du sabbat et des préceptes de pureté.
VII.6.3. Le culte et les fêtes
Les Juifs plaçaient le culte au centre de leur adoration de Dieu. C’est au Temple seul qu’étaient offerts les sacrifices rituels. Ce Temple, Esdras l’avait reconstruit après l’exil, Hérode le Grand l’a transformé et agrandi.
Comme dans l’A.T. le bâtiment du Temple comprenait le Saint et le Saint des Saints. Mais il n’y avait plus l’Arche d’Alliance qui autrefois se trouvait dans la partie la plus intérieure. Les non-juifs n’avaient accès qu’au parvis extérieur. En dépasser la limite leur était interdit sous peine de mort. Au-delà se trouvaient d’autres parvis. L’un d’eux était accessible aussi aux femmes, alors que les hommes seuls avaient accès au « parvis d’Israël ». Le domaine du Temps proprement dit était réservé aux prêtres. On y trouvait l’autel des holocaustes sur lequel on offrait deux fois par jour le sacrifice officiel et l’édifice du Temple. Seul le Grand-Prêtre pouvait, une fois l’an, le jour du Grand Pardon, pénétrer dans le Saint des Saints.
On trouve un plan détaillé du Temple dans Jérémias, Jérusalem au temps de Jésus, traduction française, Paris, 1967, p. 117-119. Voir aussi Nouveau dictionnaire biblique, Saint-Légier sur Vevey, 1983, p. 738. Ou encore George et Grelot, Introduction à la Bible, T3, Vol. 1, p. 88.
Il n’y a pas de sacrifice au cours de la liturgie de la Parole célébrée chaque semaine à la Synagogue. Elle comprend quatre parties :
1° Le schéma (« Ecoute Israël), à la fois prière et profession de foi au Dieu unique, d’après Dt 6,4ss.
2° Les Dix-huit bénédictions.
3° Lecture d’une péricope de la Loi et d’une autre empruntée aux livres prophétiques, suivie d’une paraphrase en araméen (en grec dans la Diaspora).
4° Homélie sur le texte, pour laquelle la parole pouvait être donnée à chaque juif adulte (cf. Lc 4,16ss).
Au cours de l’année, les pèlerinages pour les fêtes avaient une importance particulière.
La Pâque avait lieu le soir du 14 Nisan (mois du printemps) et commençait avec l’immolation, au Temple, des victimes pascales (agneaux ou chevaux). Cette immolation disparut après 70. La fête était suivie de la semaine des pains azymes (Mazzot) en souvenir de la hâte avec laquelle les Hébreux avaient fui l’Egypte (en Mc 14,12 les deux fêtes ont été fusionnées). Outre la fête des pains azymes, Pâque était aussi la fête du début de la moisson.
La fête des Semaines (Pentecôte) avait lieu 50 jours après Pâque. A l’origine elle était destinée à l’action de grâces pour la moisson. Mais petit à petit elle devint la fête de la conclusion de l’Alliance au Sinaï.
La fête du Grand Pardon (yom kippur), en automne, était importante. C’était un jour de jeûne. C’était le seul jour de l’année où le Grand-Prêtre pouvait pénétrer dans le Saint des Saints, pour demander pardon à Dieu pour les péchés. En signe d’expiation il immolait sur l’autel des holocaustes un bouc pour ses propres péchés, puis chargeait symboliquement des péchés du peuple un second bouc qui était ensuite chassé au désert. Ce rituel n’était plus possible après 70. Depuis, le jour du Grand Pardon est devenu le jour de la conversion.
A yom kippur s’ajoute la fête des Tentes, célébrée comme la fête des vendanges, avec un rituel particulièrement éclatant. La fête trouva par la suite un rapport à l’histoire du Salut en commémorant la sortie d’Egypte. pour ce motif les juifs vivaient 7 jours sous les huttes.
II.6.4. L’eschatologie
L’eschatologie a une importance décisive dans le judaïsme de l’époque néotestamentaire. La recherche n’arrive pas à se mettre d’accord sur son origine, c’est-à-dire sa naissance à l’intérieur de la religion juive. On distingue entre deux types fondamentaux d’eschatologie juive :
D’une part il y a l’espérance nationale et terrestre d’une libération d’Israël, ce qui signifie la continuation du message de Salut des prophètes de l’A.T.
D’autre part il y a l’attente universelle et apocalyptique de la fin du monde, de la résurrection des morts et du jugement, attente liée à l’espérance d’un nouveau monde à venir. Ce sont là des idées sans doute dues à une influence iranienne, car on n’en trouve trace ni dans le judaïsme antérieur à l’exil, ni dans la période qui suit immédiatement l’exil, ni dans la majeure partie de l’A.T.
N.B. : L’espérance eschatologique est souvent liée à l’attente d’un Sauveur. Il s’agit alors soit du Messie en tant que Sauveur national ( il est toujours un homme), soit du « Fils de l’homme », un personnage transcendant et céleste, fondateur du royaume apocalyptique.
On ne peut séparer nettement l’idée d’une espérance nationale de celle d’une eschatologie à orientation apocalyptique : l’Apocalyptique elle aussi reste liée à la nation juive et parle de préférence de l’avenir d’Israël (Dn 4 Esd). D’autre part la notion de « Messie » peut aussi contrairement à sa signification première, se rapporter à un Sauveur transcendant. Certaines structures de l’A.T. se maintiennent dans l’Apocalyptique même si logiquement elles ne conviennent plus. C’est ainsi qu’à côté de l’idée apocalyptique de la résurrection générale des morts on trouve encore parfois la notion prophétique du « reste », d’après laquelle la résurrection finale ne concernera pas tous les morts, car seul le bon reste du peuple ou de l’humanité sortira indemne du jugement et entrera dans le monde nouveau.
L’auteur d’une apocalypse conçoit son enseignement comme un réconfort apporté au peuple opprimé. Il faut affirmer, au temps de la tribulation, que ces événements douloureux sont conformes à la volonté de Dieu qui y mettra fin dans un avenir imminent. Dans cette perspective l’idée d’une juste rétribution joue un grand rôle : les souffrances du peuple et de chaque croyant se transformeront en joie dans l’autre monde et l’ennemi, qui triomphe encore à l’heure présente, sera anéanti.
Dans les ouvrages apocalyptiques l’idée de l’espérance est fortement « spiritualisée » et individualisée : le salut n’est plus attendu du futur de l’histoire, mais de l’au-delà. L’individualisation de la piété est une caractéristique générale du judaïsme de l’époque néotestamentaire. Elle ne se reflète pas seulement dans l’Apocalyptique, mais encore dans la sagesse.
VII.6.5. Particularités du Judaisme de la Diaspora
Bien plus de juifs vivaient dans la Diaspora qu’en Palestine. L’expansion géographique du judaïsme est illustrée par la « liste des peuples » de Ac 2,9-11. Mais il faut remarquer que judaïsme hellénistique et Diaspora ne se recouvrent pas. Il y a des juifs fixés loin dans l’Orient; un groupe important vivait en Mésopotamie, et le Talmud babylonien témoigne de leur activité théologique. Le centre spirituel et économique le plus important du judaïsme hellénistique de la Diaspora, était Alexandrie, où vivait Philon. Là et à Cyrène (Libye) les juifs formaient des associations politiques autonomes.
Dans l’empire romain les juifs ont sans doute, d’une façon générale, joui du statu des peregrini, c’est-à-dire des non-citoyens. Sur le plan judiciaire, certains avantages leur étaient accordés et leur religion jouissait d’une protection particulière. Dans leur environnement « païen » les juifs se firent surtout remarquer par le caractère exclusif de leur religion. Ils étaient les seuls dont la participation à des cultes étrangers paraissait impensable. L’absence d’image dans leur culte était surprenant et étrange à leur entourage et les caractérisait. Incompréhensible semblait aussi leur observance du sabbat. Comment un Romain juge les Juifs, c’est ce que révèle Tacite dans Hist. V 3-5.
Les Juifs menaient une activité missionnaire parmi les non-juifs. On distinguait entre deux groupes de convertis :
les Prosélytes, qui passèrent au judaïsme, se firent circoncire et observaient toute la Loi.
Les « Craignant Dieu », qui acceptaient la profession de foi juive en un seul Dieu, sans adopter l’ensemble des prescriptions de la Loi (notamment la circoncision).
VII.6.6. Littérature judaïque hellénistique
Le judaïsme hellénistique a produit une abondante littérature. Mais, à l’époque néotestamentaire, elle ne fut conservée que dans la Tradition chrétienne, alors qu’à l’intérieur du judaïsme lui-même elle fut complètement marginalisée par la littérature rabbinique.
La traduction de la Bible en grec a été une œuvre remarquable. La légende relative à la réalisation de cette traduction, appelée la Septante (LXX), a été transmise dans la Lettre d’Aristée. En réalité, elle a été l’œuvre, longuement mûrie, de toute une Tradition, reproduite et diffusée en versions différentes, intégrée à un canon qui s’écarte de la Bible hébraïque. Il n’y a pas de doute que la LXX a été particulièrement importante pour l’évolution spirituelle du judaïsme hellénistique. Elle fut considérée comme inspirée au même titre que l’original hébraïque. Le fait que le christianisme primitif a adopté la LXX comme Ecriture Sainte et l’a interprétée dans un sens christologique a amené le judaïsme au deuxième siècle à la remplacer par d’autres traductions (Aquila, Symmachus, Theodotion).
N.B. : La structure et la composition de la LXX s’écarte en partie considérablement du canon hébraïque (et donc aussi des traductions courantes de l’A.T.). Un aperçu détaillé à ce sujet est fourni en Nestlé 26, p. 739ss.
Les écrits apologétiques du judaïsme hellénistiques polémiquaient contre le polythéisme, surtout conte le culte des image, et ils défendaient le monothéisme. Il faut mentionner dans cet ordre d’idées la Sapientia Salomonis, le roman sur Joseph et Aseneth, l’écrit de Josèphe contre Apion, et surtout les œuvres de Philon.
Nous avons un témoignage du conflit entre judaïsme et Hellénisme en 2 M. L’ouvrage critique expressément la tendance à rechercher une synthèse entre les deux cultures, surtout dans le domaine religieux. Cette critique concerne au premier chef les rois syriens Seleucus et Antiochus Epiphane.
La figure la plus remarquable du judaïsme hellénistique c’était Philon, théologien et philosophe religieux qui vivait à Alexandrie, un contemporain de Jésus (né an 15-10 avant J.C., mort en 40 après J.C.). Il intervint politiquement lorsque en 40 après J.C. il conduisit une délégation des Juifs d’Alexandrie auprès de l’empereur Caligula pour protester contre les mesures anti-juives prises par les Alexandrins et pour essayer d’obtenir le maintien des droits reconnus aux Juifs. Il a composé un commentaire fort long et allégorique de la Genèse, paru en plusieurs volumes, courts commentaires du Pentateuque (conservés en partie seulement). Il a composé en outre des traités systématiques, entre autres sur la création et la législation de Moïse. Se écrits historico-apologétiques sont importants. Il y présente avant tout Moïse comme un souverain et un législateur idéal, et le judaïsme comme la vraie religion et la vraie philosophie. Sa méthode la plus importante dans l’explication de la Bible, c’est l’allégorie. Il traduit les récits vétérotestamentaires dans le langage culture de la philosophie hellénistique et présente les patriarches comme des modèles de vie morale. Mais Philo est resté fidèle au Judaïsme, à son enseignement dogmatique de base, à sa Loi.
VII.6.7. Les Esséniens (Communauté de Qumran)
Le groupe des Esséniens vivait en marge du judaïsme officiel. Pourtant il ne s’en est pas séparé fondamentalement et ne passa pas pour hérétique. Il était convaincu de représenter le véritable Israël, aussi ses membres s’efforçaient-ils particulièrement à maintenir en vigueur toutes les prescriptions de la Loi relatives à la pureté. Ils reconnaissaient certes le Temple de Jérusalem fondamentalement comme le lieu de culte des Juifs, mais ils le considéraient comme profané (illégitimité du Grand-Prêtre en exercice). Aussi ne participaient-ils pas ni aux sacrifices ni aux fêtes juives traditionnelles.
Au sujet des Esséniens, on trouve chez les auteurs de l’antiquité des appréciations très diverses.
Une partie des Esséniens s’est séparée géographiquement des autres Juifs et vécut à la manière, d’une ordre monastique dans un couvent situé au désert, près de la Mer Morte (Qumran).
Depuis qu’en 1947 on y a découvert de nombreux manuscrits en forme de rouleaux, on a procédé à d’importantes fouilles. Le résultat, c’est que nous sommes mieux renseignés sur la communauté de Qumran que sur n’importe quel autre groupe juif, bien qu’on n’en trouve aucune mention directe dans le N.T. On a surtout découvert une bibliothèque très fournie qui nous initie au culte, à la théologie et à la vie quotidienne de la communauté.
Il est utile de connaître le système des sigles employés pour désigner les documents trouvés. Le chiffre de tête indique la grotte d’où provient le manuscrit. L’initiale Q signifie : Qumran, puis vient l’abréviation du titre de l’œuvre en hébreu (ou provisoirement, dans la langue de l’éditeur) : p= péschèr; S= sérèk ou règle; h= hâdayoth ou hymnes. Exemple : Ainsi 4 Qp Nah = Péchèr de Nahum provenant de la grotte IV. Les textes sont toujours cités en fonction de la colonne du manuscrit (en grandes capitales : 1 QS IV,2 = Règle de la communauté, col. 4, ligne 2.
Les groupes les plus importants des écrits de Qumran sont :
les Règles, c’est-à-dire le Document de Damas (CDC = Caire Damacus Covenant) et la règle de la communauté (1 QS), avec ses deux compléments (1 QS a et QS b)
les commentaires d’écrits bibliques ou « pesharim »;
la poésie religieuse ou hâdayoth,
l’œuvre eschatologique intitulée Règle de la guerre des Fils de Lumière contre les Fils des Ténèbres (1 QM).
Au centre de la doctrine de Qumran il y avait le principe que les exigences de la Loi doivent être remplies. Ceux qui entraient dans la communauté avaient à réaliser cela concrètement en acceptant la Règle. Le groupe exigeait la renonciation à toute propriété privée et les préceptes de pureté étaient renforcés.
Les représentations eschatologiques de la communauté de Qumran étaient marquées par le dualisme. Lumière et Ténèbres sont en conflit. Dans le présent les Fils de Lumière et ceux des Ténèbres, sont opposés les uns aus autres et chaque homme doit opter définitivement pour un camp ou l’autre (cf 1 QS III au sujet des deux esprits et leurs voies). A la fin des temps, après la dernière guerre entre les deux esprits, la Seigneurie de Dieu commencera à se manifester. Et dans l’eschatologie de Qumran il y a deux figures messianiques : le Messie sacerdotal au premier rang, et le Messie politique au second. Cette hiérarchie entre les deux Messies reflète l’ordre hiérarchique en vigueur dans la communauté de Qumran, telle qu’elle est établie dans l’organistation extérieure et au repas communautaire.
Souvent on discute de la question de savoir comment la doctrine de Jésus et du christianisme primitif (surtout à la lumière des antithèses du Sermon sur la Montagne) se situe par rapport à la théologie de la communauté de Qumran. Il y a convergence pour certains thèmes : ici comme là l’homme est provoqué à une option décisive et fondamentale. Ici comme là il y a un dualisme Lumière-Ténèbre. Qumran, tout comme le christianisme primitif, connaît l’idée de prédestination. Mais la différence fondamentale réside dans l’interprétation de la Loi : l’appel de Jésus à une fondamental, c’est-à-dire il s’oriente d’après la situation concrète du prochain, alors qu’à Qumran la rigueur dans l’éthique est une question de principe. Jésus ne fait pas de la renonciation aux biens une question de principe (cf. Mc 10,17-31), car il ne fait pas des performances de l’homme une préalable à la grâce de Dieu. Dans une situation concrète personnelle l’obéissance aux exigences de Dieu peut se concrétiser dans la pauvreté volontaire, mais Jésus n’en fait pas un principe. Il en est de même des rapports entre Paul et Qumran; les deux connaissent l’idée de la sola gratia. Mais, alors que Paul en déduit que le Christ est la fin de la Loi (Rm 10,4), à Qumran celle-ci est encore urgée à la lumière de cette conception de la grâce. La communauté chrétienne tout comme celle de Qumran édifient leur existence sur la figure historique d’un fondateur: Jésus ou le « Maître de Justice ». Mais il est caractéristique de constater que le christianisme voit en Jésus un Sauveur, alors que le Maître de Justice remplit pour l’essentiel les fonctions d’un Docteur de la Loi.
VIII.1. Les Samaritains
Les Samaritains vivaient pratiquement en dehors du Judaïsme officiel. Ils étaient considérés comme hérétiques.
Les causes de la naissance de cette communauté juive particulière sont largement inconnues. Ce qui a été décisif dans la séparation d’avec les autres juifs c’est la fondation de leur sanctuaire propre pour le Mont Garizim (probablement à la fin du IVe siècle avant J.C.). Comme ils ne reconnaissaient que le seul Pentateuque comme Ecriture Sainte, ils rejetaient, jusque dans la période néotestamentaire, aussi bien l’idéee d’une résurrection des morts que l’Apocalypse en général. Leur profession de foi comporte quatre affirmations principales : il y a Un seul Dieu; Moïse et la Loi constituent le fondement de la Religion; le lieu du culte, c’est le Mont Garizim; l’espérance a pour objet un jour futur de vengeance et de récompense.
C’est dans Jn 4 que l’on trouve le premier document attestant une attente messianique chez les Samaritains. Mais il est possible que c’est Jean qui leur attribue ce messianisme. Les sources samaritaines ne parlent que tardivement de leur attente d’un « Prophète comme Moïse » (cf Dt 18,15-19; Boismard, « Moïse ou Jésus »), appelé Ta’eb.
N.B. : La traduction du terme Ta’eb est discutée. Il y a plusieurs possibilités : a) le restaurateur (du culte); b) « celui qui ramène » (les hommes à la conversion); c) ou simplement « celui qui revient ».
Le Ta’eb n’est pas une figure surnaturelle et nullement un Sauveur, et il reste subordonné au sacerdoce.
Au sujet des relations entre les Samaritains et les autres Juifs à l’époque néotestamentaire, les chercheurs sont d’avis différents. D’après Jérémias, les rapports étaient soumis à de fortes variations. Mais on peut dire qu’à l’époque de Jésus « l’attitude des juifs à l’égard des Samaritains ne différait pas fondamentalement de celle qu’ils avaient à l’égard des païens » (Jérusalem au temps de Jésus, 1967, p. 468). A l’opposé, d’après la thèse de H.G. Kippenberg, malgré la séparation entre Juifs et Samaritains, de l’époque des Maccabées jusqu’au 2e siècle après J.C., certains rabbins étaient encore conscients que les Samaritains étaient des Israëlites et non des païens.
VIII.2. Les religions non juives de l’époque néotestamentaire
VIII.2.1. Déplacement des peuples
Grâce à Alexandre le Grand, la culture grecque a pénétré profondément en Orient. Par contre, à l’époque romaine, l’arrivée en Occident (Italie) d’hommes en provenance de l’Est de l’Empire devint un facteur toujours plus important d’évolution religieuse. Car les mutations politiques, économiques et culturelles liées à cette migration entraînèrent une nouvelle manière de voir et de comprendre le monde. Certe le culte traditionnel des dieux romains et grecs fleurissait apparemment comme auparavant. Ils avait droit à un culte officiel à l’occasion des grandes fêtes. Mais celui-ci était rarement encore l’expression d’un effort religieux, d’une vraie foi en Apollon ou Athéna, Jupiter ou Diane. Ce qui caractérisait l’époque, c’était la diffusion des religions et la formation de communautés dans toutes les parties de l’empire.
Il en est résulté que les religions anciennes subirent l’influence d’éléments nouveaux, ce qui engendrera le « syncrétisme ». Le propre de ce syncrétisme, c’était l’identification des dieux grecs avec ceux de l’Orient. Les histoires ou mythes des premiers et les fonctions propres aux seconds se mélangèrent. Par exemple Aphrodite fut identifiée avec Isis d’Egypte et on le célébrait comme fondatrice de la culture et du droit. Hermes, autrefois messager des dieux et dieu du commerce devint, par son identification avec Thot l’Egyptien « Hermes Trismegistos », à la fois Logos, Sauveur, et patron d’une littérature édifiante très répandue (cf le Corpus Hermeticum, surtout le traité Poimandrès). Le Zeus/Baal d’Heliopolis en Syrie devint le dieu universel, qui rassemblait en lui les autres dieux.
Cette façon d’identifier les dieux les uns avec les autres favorisa la tendance au monothéisme. Celui-ci correspondait aussi au développement de la philosophie. On ne contesta pas pour autant l’existance de plusieurs dieux. Mais la tendance se fit jour de considérer ces différents dieux comme des manifestations variées d’une puissance divine unique. A ce sujet on a un document impressionnant dans l’un des fragments orphiques;(cf. E. Peterson, ÅÉÓ ÈÅÏÓ p. 241-242).
VIII.2.2. Les types de religions
Il faut distinguer entre les différents types de dieux et les différents types de cultes.
A Babylone et en Syrie étaient surtout répandus les divinités astrales. Les Baals syriens, dont parle l’A.T., étaient à l’origine des divinités de la végétation, et sont devenues des divinités astrales sous l’influence des Chaldéens. Il y avait même la tendance à les considérer comme des divinités universelles.
La croyance aux divinités astrales est née grâce à une nouvelle interprétation de l’ancienne croyance au destin, laquelle voyait l’homme lié au sort fixé par le destin. Désormais les astres sont considérés comme les maîtres de l’univers, les anciens dieux deviennent des puissances cosmiques, lesquelles acquièrent de la sorte le pouvoir de libérer l’homme de sa destinée impitoyable. Dès lors il n’est plus livré sans merci au destin, et il peut, grâce à la croyance aux divinités astrales, être libéré et sauvé.
N.B. : Cette idée fut par la suite à la base de la magie et surtout de la gnose.
Une autre croyance était également répandue, la croyance aux « dieux qui meurent et ressuscitent ». Ils symbolisaient à l’origine le cycle de la nature, mais furent individualisés par la suite. En Orient, il s’agissait en partie de dieux de tel ou tel peuple (cf. Isis). Mais dès qu’ils arrivèrent en Occident, ils perdirent ce caractère national et devinrent l’objet d’un culte dans des communautés d’un type sociologique nouveau, dans lesquelles les fidèles étaient unis entre eux sans distinction de l’appartenance nationale.
Un phénomène particulièrement caractéristique était constitué par l’apparition des religions à mystère. Dans les mystères antiques il s’agissait de libérer l’être de l’homme de l’emprise des puissances démoniaques, le myste obtenant par le mystère de participer à la destinée du dieu célébré. « Consolez-vous, mystes, le dieu est sauvé; aussi seront-nous également sauvés de la souffrance ». Cette proclamation du culte d’Osiris mourant et ressuscitant caractérise l’essentiel de cette religiosité. Dans la cérémonie d’initiation la vie ancienne du myste mourait et une vie nouvelle, dans les Salut, commençait.
C’est surtout le culte d’Isis qui était répandu. Elle est considérée comme la maîtresse du cosmos, celle qui connaît tout. Elle est la sagesse personnifiée. C’est elle qui, sous des noms et des rites variés est vénérée dans le monde entier, disait Apuleius. Dans le culte elle est invoquée comme « una quae es omnia » (toi qui, l’unique, es tout » ; E. Peterson, ÅÉÓ ÈÅÏÓ,1926, p. 235).
Outre le culte d’Isis et d’Osiris il y avait les cultes d’Attis et d’Adonis, qui se rattachent au même type de dieux. A ce propos il faut souligner que les cultes à mystères ne jetaient pas d’exclusive. En effet, on pouvait se fait initier à plusieurs cultes en même temps. Significatif est aussi le fait que les religions à mystères n’avaient pas d’organisation supra-régionale et ne formaient pas d' »Eglise ».
N.B. : Il serait faux de déceler derrière les différentes religions à mystères une théologie ou une anthropologie unique. Mais leur grande popularité illustre un tournant décisif par rapport à la période classique, caractérisé par un engouement pour le mystique et l’irrationnel.
Un autre aspect significatif de la religiosité de l’époque, c’était la divination, l’astrologie et la croyance aux thaumaturges. On consultait l’oracle. Ainsi un père demande au dieu Serapis si son fils était prêt à s’entendre avec lui. Parmi les thaumaturges de l’époque, le plus célèbre était le philosophe itinérant Apallonius de Tyana, auquel on a attribué entre autres des résurrections de morts et des expulsions de démons.
Il faut aussi mentionner d’autres manifestations du fond religieux. Les formules et les pratiques magiques étaient très répandues au 2e siècle avant J.C. On pensait que grâce au recours à certains moyens on pouvait amener les dieux à accomplir certains actes ou à en omettre d’autres.
Dans le domaine de la religiosité la culture hellénistique a produit non seulement des contenus nouveaux; mais aussi des formes nouvelles. Cela s’explique par le fait que le culte des nouveaux dieux n’était plus un culte de l’état ou de la cité, mais celui d’une communauté répandue à travers le monde, qui se réunissait librement, sans barrières nationales ou sociales, pour servir la divinité.
Ce qui caractérisait les religions à mystères, à la différence des célébrations de la religion officielle, c’était que le culte se déroulait dans des locaux fermés, inaccessibles aux non initiés. Mais à côté de ces célébrations secrètes, il y avait aussi des fêtes publiques, destinées à faciliter la publicité et donc l’extension du culte. Prudentius décrit la consécration d’un prêtre à la grande mère.
Le rite le plus important des religions à mystères, c’était celui de l’initiation du myste par le mystagogue. C’est dans le plus grand secret que le novice se soumettait à certains rites de purification. Ensuite il y avait la remise du symbole et finalement la vision de la divinité. Il est évident que, surtout dans le culte des déesses, un rôle important revenait à une forte symbolique sexuelle.
Cela et le caractère secret des célébrations à l’écart du public étaient un motif, pour la politique religieuse des Romains, de s’attaquer au culte d’Isis à la suite d’une décision du Sénat. Sous le règle d’Auguste des lois sont promulguées contre les religions à mystères. Mais à la longue ces cultes surent résister. Déjà Caligula permit la construction d’un temple d’Isis au Champ de Mars.
IX. Introduction au différents livres du Nouvau Testament dans l’ordre actuel
IX.1. Notes préliminaires sur la question synoptique
Les faits évangéliques nous sont connus par quatre récits, dont l’un, celui de Jean, se révèle tout à fait original, les trois autres ayant entre eux des analogies très importantes. Les trois premiers sont appelés « évangiles synosptiques », parce qu’ils se laissent facilement disposer en « synopse », c’est-à-dire en tableau à plusieurs colonnes parallèles. La comparaison synoptique a deux avantages: 1° poser la question des sources évangéliques, les essais antérieus (Lc 1, 1) appuyés sur ce qu’ont transmis les témoins oculaires (Lc 1, 2); 2° mesurer le travail rédactionnel accompli par les auteurs responsable de nos évangiles canoniques. L’attention à l’originalité de chaque évangéliste nous conduira vers la compréhension de son message théologique.
Quelques renseignements nous viennent de la tradition patristique. Selon Papias de Hiérapolis (né vers 70), Mc dépendait de la prédication de Pierre et Mt avait été écrit » en dialecte hébra•que » tandis qu’Irénée confirme que Mt a été écrit « chez les Hébreux dans leur dialecte, que Mc dépend de la prédication de Pierre mise par écrit après sa mort, et que Luc transmet la prédication de Paul. Clément d’Alexandrie (+444) s’appuyant sur « une tradition des presbytres » affirme que « les évangiles qui comportent des généalogies » ont été écrits les premiers, et que Mc se rattache à la prédication de Pierre. Origène enfin, basé sur une autre tradition, atteste l’origine hébra•que de Mt, la dépendance pétrinienne de Mc et le rattachement de Lc à Paul.
L’ordre et le contenu des péricopes diffèrent parfois. L’ordre de Mt et celui de Mc diffèrent jusqu’aà Mt 14, 1 = Mc 6, 14; ensuite, les deux textes sont étroitement parallèles pour tous les épisodes qu’ils ont en commun. La divergence du début peut s’expliquer par la tendance matthéenne de regrouper les miracles (Mt 8-9) et les controverses avec les Pharisiens (Mt 11-12)
On remarque des épisodes qui ne sont pas attestés chez Mc, mais qui sont présents dans le même ordre chez Mt et chez Lc: Mt 4, 1-11 et Lc 4, 1-13; Mt 5-7 et Lc 6, 29-40; Mt 8, 5-13 et Lc 7, 1-10; Mt 8, 19-22 et Lc 9, 57-60; Mt 10, 9-16 et Lc 10, 2-12; etc… On explique ce phénomène par l’existence d’une source étrangère Dans certains épisodes, Mt et Mc sont très proches verbalement l’un de l’autre; Lc et Mt aussi; au contraire, Mt et Lc ont d’importantes différences verbales dans les passages où ils peuvent être comparés à Mc. La critique littéraire vise à restituer les formes simples de la tradition qui sont à l’origine des textes complesxes. Un phénomène particulièrement important esst celui des « expressions doubles » de Mc correspondant à une expression simple » chez Mt et chez Lc. Comparer Mc 8, 16 (« le soir venu ») avec Lc 4, 40 (« au coucher du solei »). Les deux expressions sont combinées en Mc 1, 32: « le soir venu, après le coucher du soleil ». Ce phénomène peut se répertorié 100 fois chez Mc. Deux explications possibles: 1° Mc a l’habitude de s’exprimer de manière redondante, tandis que Mt et Lc ont jugé nécessaire de supprimer ses pléonasmes; 2° la simplicité de Mt et Lc provindrait du schématisme primitif de la tradition orale, et la complexité du texte de Mc de son désir d’harmoniser la tradition prématthéenne et la tradition prélucanienne.
Plusieurs théories essayent d’expliquer la similitude des évangiles synoptiques:
1° La théorie de la dépendance mutuelle directe: l’évangile écrit le premier a été la source du deuxième, et le troisième dans l’ordre chronologique dépend nécessaireme de l’un et de l’autre à la fois. Le schéma qu’on cherche à défendre est le suivant: Mt grec est l’évangile primitif, Lc est une transformation de Mt, Mc a fusinné, en les abrégeant, ses deux prédécesseurs. Cette hypothèse semble invraissemblable, car Mt grec apparaît comme le fruit tardif d’une histoire littéraire complexe, faisant echo au problème de l’évangélisation des pa•ens et aux difficiles relations entre le christianisme et le juda•sme rabbinique après la catastrophe de 70. Cette théorie n’explique pas comment Lc aurait omis certains épisodes matthéens, ni comment Mc aurait élimimé des récits de richesses précieuse, telles que les évangile de l’enfance, la prière du seigneur (Mt 6, 9-15 et Lc 11, 2-4), les paraboles de la miséricordes (Lc 15,1-10 et Mt 18,12-35), les récits d’ apparutions du Ressuscité (Mt 28, 9-10.16-20; Lc 24, 13-43).
2° La théorie des deux sources. Elle affirme que Mt et Lc dépendent, d’une part, de Mc tel que nous le connaissons, d’autre part d’une seconde source hypothétique, la Quelle (Kwele en sigle: Q), où Mt et Lc ont puisé les paroles et gestes de Jésus, ignorés par Mc, qu’ils reproduisent l’un et l’autre. En effet, l’examen de l’ordre des péricopes conduit à admettre que Mt et Lc ont combiné, chacun à samanière, une série de faits évangéliques attestés par Mc (triple tradition) et une autre série absente de Mc (double tradition). On trouve beaucoup de « doublets chez Mt et Lc: la même parole est attestée deux fois chez Mt et Lc, une première fois dans un contexte parallèle à celui de Mc, une seconde fois dans un contexte non marcien. Quelques problèmes insolubles: 1° les accords entre Mt et Lc contre Mc; 2° les omissions de Mt (Mc 1, 23-27; 4, 26-29; 5, 18-20; 7, 32-37; 8, 22-26; 9, 38-40; 9, 49-50; 12, 32-34; 12, 40-44); 3° les omissions de Lc (sur 661 versets de Mc, seulement 350 environ ont un correspondant chez Lc; la section Mc 6, 45-8, 26 est totalement absente de Lc).
3° Le courant admettant une documentation multiple. Il porte une attention sur la complexité des textes et aux caractéristiques stylistiques de chaque évangile. Ce courant permet aussi d’intégrer un aspect important: la part de la tradition orale dans la formation des évangile.
IX.2. Évangile selon St Matthieu:
Premier évangile dans la disposition actruelle des livres du Nouveau Testament, mais l’évangile selon Matthieu semble postérieur à celui de Marc.
IX.2.1. Destinataire et date
Les destinataires de Mt sont avant tout des chrétiens venus du juda•sme, sans doute d’Isra‘l-Palestine. Les auditeurs de Mt connaissent les Ecritures, car l’auteur les citent abondamment et fait une large place à la discussion avec le juda•sme (Mt 19, 1ss; 22, 23ss). Ils sont en conflit ouvert avec les Pharisiens (Mt 22, 15ss; 23, 13-36), qui se sont regroupés après la destruction de Jérusalem en 70. Matthieu invite à l’ouverture aux pa•ens. Le premier évangile est considéré comme un manuel de pastorale destiné aux chefs de communauté et aux missionnaires. Mt présuppose Mc, et a donc dû être composé plus tard. En Mt 22, 7, dans la paraboles des noces royales, on dit que les trouves du roi ont incendiée la ville de ceux qui ont refusé l’invitation. Cela se rapporte à la destruction de Jérusalem en 70. Donc la rédaction définitive, en grec, semble dater d’après 70 (cf. 22, 7; 23, 35-36), vers 80 ou 85. Les Communautés Chrétiennes et la Synagogue se font face, mais ne sont pas encore séparés. Or c’est vers 90 que les Pharisiens, réunis à Jammnia (Yabné), décidèrent d’exclure les chrétiens des cultes de la synagogue. Le lieu de la composition serait la Syrie, car chrétiens et juifs y vivent côte à côte et parce que dans la communauté matthéenne il y a beaucoup de judéo-chrétien et les pagano-chrétiens sont en croissance rapide. La composition manifeste un substrat sémitique, tant par les tournures de style que par la mentalité; les procédés littéraires correspondent aux modèle didactiques des rabbins de l’époques: répétitions, parallélismes, inclusions et agrafes, groupements numériques. Le texte s’apparente à l’homilétique juive, avec une stylisation liturgique propre.
IX.2.2. Structure de l’Evangile selon St Mt
Plusieurs critères peuvent servir à relever la structure du premier évangile:
1° les données topographiques correspondant aux étapes de la vie de Jésus;
2° l’utilisation des sources;
3° alternance des discours et des parties narratives.
* Un plan dynamique distingue:
a) prologue ou récit de l’enfance qui montre que Jésus est le Fils de David, le Messie annoncé par les Prophètes (1-2).
b) deux grandes étapes: refus du peuple de croire en Jésus (3-13); la passion et la gloire, avec la formation de l’Eglise (14-28).
* Alternance régulière « parole/action »
* Optons pour la structure selon les étapes de la vie de Jésus où Mc paraît revu, corrigé et surtout augmenté dans les cinq discours par Mt (7, 28; 11, 1; 13, 53; 19, 1; 26, 1)
–> Récit de l’enfance (1-2)
– généalogie de Jésus : 1, 1-17
– naissance à Bethléem: 1, 18-25
– adoration des Mages : 2, 1-12
– fuite, massacre des Innocents et retour à Nazareth: 2, 13-23
–> Section 3, 1-4,11: début du ministère de Jésus
– Jean-Baptiste: 3, 1-12
– Baptême de Jésus: 3, 13-17
–> Section 4, 12-13, 58: activité de Jésus en Gallilée
– première manifestation: 4, 12-17
– appel des premiers disciples: 4, 18-22
– bref sommaire: 4, 23-25 = 9, 35 qui encadre
– un grand ensemble de paroles (5-7) et des miracles (8-9)
– envoi en mission: 9, 36-11, 1
– Jésus et Jean-Baptiste: 11, 2-19
– lamentation sur les villes de Galilée: 11, 20-24
– luange au Père: 11, 25-30
– controverses: Mt 12 <=> Mc 2, 23-3, 25
– sept paraboles: Mt 13; rejet de Jésus à Nazareth: Mt 13 53-58 <=> Mc 6, 1-6
–> Section 14, 1-20, 34: Jésus sur les routes
– en Galilée et territoires voisins: 14, 1-16, 12 = Mc 6, 14-8,21
– montée à Jérusalem: 14, 13-14
– confession de Pierre : 16, 13-20
– annonce de la Passion: 16, 21 Mt 16, 13-18, 9 <=> Mc 8, 27-9, 50
–> Chapitre 18: plusieurs logia sur la vie communautaire
–> Chapitres 19-20: reprise de Mc 10, 1-52 avec insertion de Mt 20, 1-16
–> Chapitres 21-25: derniers jours de Jésus à Jérusalem
– 21-22 reproduisent essentiellement Mc 11-12
Cycle des controverses et discours derniers
– contre les Pharisiens et les scribes: Mt 23
– le fins dernières: 24-25; Mt 24 <=>Mc 13; Mt 25 est propre à Matthieu: 2 paraboles
–> Chapitre 26-28: récit de la RPasion et de la Résurrection
– complot contre Jésus: 26, 1-5
– l’onction à Béthanie: 26, 6-13
– trahison de Judas : 26, 14-16
– à table avec le Douze à la Dernière Cène: 26, 20-35
– à Gethsémani et arrestation: 26, 36-57
– le Procès de Jésus et crucifixion: 26, 57-27, 44
– mort et ensevelissement de Jésus: 27, 45-61
– la garde du tombeau: 26, 62-66
– tombeau vide, apparutions et envoi en mission: 28, 1-20
IX.2.3. Théologie (message) de St Mt
Le message se dégage principalement des grands discours.
1° Méthode pour présenter ce massege:
– la façon de clôturer un discours (7, 28);
– style plus concis des miracles de manière à faire ressortir la parole de Jésus à chaque fois comme la pointe de la péricope (cf. Mc 2, 1-18 et Mt 9, 1-8); Jésus est mis en évidence dans les récits.
– les controverses incorporent d’autres logia ou des citations de l’AT: cf. Mc 2, 23-3, 6 => Mt 12, 1-14
2° Le message proprement dit:
– montrer face à la Synagogue qu’en Jésus, le Messie, d’Isra‘l, les Ecritures ont trouvé leur accomplissement et par conséquent la Communauté Chrétienne est devenue héritère des promesses. D’où la formule: « Mais cela arriva pour que s’accomplisse ce que le Seigneur avait dit par le prophète » (1, 22). Matthieu établit toujours un rapport entre l’annonce et l’accomplissement afin de démontrer la réalisation des paroles prophétiques (Mt 21, 5-7 <=> Za 9, 9). Quelques démonstration de la messianité de Jésus comme accomplissement de l’Ecriture: 1, 1-17; 1, 18-25 (cf. Mi 5, 1);accomplissement de la Torah ( 5, 17-20) et son interprétation authentique (5, 25-48); ses miracles sont un signes de l’accomplissement des paroles des prophètes (11, 2-6): A la question de jean-Baptiste, il répond: « Allez rapporter à Jean ce que vous voyez et entendez: les aveugles retrouve la vue « (Is 42, 18). En tant que Messie, Jésus est le Serviteur Souffrant décrit en Is 53 (cf. Mt 8, 16-17; 12, 18-22)
– La pensée de Matthieu s’enracine dans la foi juive: justice supérieure à celle des Pharisiens (5, 20); le sabbat (24, 20); les sacrifices (17, 24-27; 5, 23-24); les brebis perdues de la maison d’Isra‘l (15, 24). Jésus envoya les disciples d’abord à la maison d’Israêl (10, 5-6) et ce n’est qu’après la Résurrection qu’il les envoie dans la monde entier (28, 19-20).
IX.2.4. L’auteur
Du grec maththaios ou matthaios, de l’hébreu, matteyah, signifie « don de YHWH ». La tradition pense qu’il est l’un des douze apôtres de Jésus (Mc 3, 18), fils d’Alphée qui semble originaire de Capharnaüm (Mc 2, 14-15). Le premier évangile le présente comme publicain (Mt 10, 3) et il évoque son appel par Jésus (Mt 9, 9). Les autres évangélistes l’appellent Lévi à cet endroit (Mc 2, 14; Lc 5, 27). Le témoignage de Papias, mentionné dans la question synoptique, semble une défense de Mt contre les reproches qui lui furent faits sur le plan linguistique.Il pense à un original en hébreu. Cet témoignage nous est utile seulement pour savoir que les évangiles ont été rassemblés avec le souci de les attribués aux Apôtres. L’auteur ne semble pas rapporter un vécu personnel, mais il utilise l’évangile de Marc et Q, ainsi que d’autres sources propres à la tradition. En effet, Mt suit Mc même pour une citation de l’AT sous une forme qui s’écarte de l’original (Mc 1, 3 = Mt 3, 3; Mt 19, 4 = Mc 10, 6; cf. Gn 1, 27). Lorsqu’il recourt à l’AT lui-même, il cite selon l’original et non selon la Septante. On voit donc qu’il dépend beaucoup des sources qu’il cite.
Ce qui est sûr sur l’identification de l’auteur est que l’analyse du texte le montre d’origine judéo-chrétienne, si on se base sur: son utilisation de l’Ecriture, son enracinement dans la tradition juive. Il n’esplique pas les usages et les coutumes des Juifs, car il les suppose connus de ses lecteurs: Mt 15, 2 # Mc 7, 1-4. Mt parle des phylactères et des franges (23, 5). Il fréquente les Ecritures et souvent, il les explique: discussion d’école et controverses. Il a reçu une formation de scribe (13, 52) qu’il sait exploiter pour présenter le message du Christ et le justifier face aux objections juives. Il appartient à des cercles judéo-chrétiens qui d’une part cherche à sauvegarder l’héritage d’Isra‘l, et d’autre part, reconnaissant l’existence de l’Eglise issue du paganisme, savent que le message du christ s’adresse au monde entier.
IX.3. Évangile selon St Marc
L’évangile de marc semble avoir été la première oeuvre du genre « évangile » dans le Nouveau Testament. Son titre en développe le propos: « Commencement de la Bonne Nouvelle de Jésus, Christ, Fils de Dieu » (1, 1).
IX.3.1. Destinataires et date
Selon la tradition, Marc a écrit son évangile à Rome, d’après le témoignage de Pierre, mais après sa mort. La date est difficile à préciser; la majorité des exégètes la situent avant la chute de Jérusalem, entre 64 (mort de Pierre) et 69, mais la publication peut être tardive; même une nouvelle édition peut avoir vu le jour après 70. Le discours apocalyptique (13) montre que la destruction de Jérusalem n’avait pas encore eu lieu. Certains pensent que c’était pendant la guerre juive (66-70), car l’évangile exprime une Parousie imminente (14, 28). Pourtant le chapitre 13 indique une série d’événéments avant coureurs. La langue et et la théologie sont marqués par un environnement hellénistique: il explique de qu’il parle des traditions juives (Mc 7, 3). Le latinisme qui fait penser à une composition à Rome, notamment le terme légio (4, 9), n’est pas une preuve suffisante car Marc pouvait le trouver ailleurs dans l’Empire.
Ce qui est sûr est que Marc s’adresse à des pagano-chrétiens auxquels il explique les usages juifs (7, 3-4; 14, 12; 15, 42). Il traduit pour ses lecteurs l’araméen de sa source (3, 17; 5, 4; 7, 11.34; 9, 43; 10, 46; 14, 36; 15, 22.34).
IX.3.2. Structure et contenu
Marc contient deux grandes partie: l’activité de Jésus en Galilée (1-10) et sa Passion à Jérusalem (11-16).
* En Galilée:
– début de l’activité (1, 1-13)
– région de Capharnaüm et à Capharnaüm (1, 14-45)
– série des controverses (2-3)
– paraboles (4, 1-34)
– séries des miracles (4, 35-5, 43)
– récits particuliers (6, 1-33): Nazareth, Mission, retour, Hérode, mort de Jean-Baptiste
> Deux sections construites de façon parallèle: 6, 34-7, 37 <=> 8, 1-26
– multiplication des pains (6, 34-44 <=> 8, 1-9)
– traversée sur les eaux (6, 45-56 <=> 8, 10)
– controverse (7, 1-15 <=> 8, 11-13)
– instructions aux disciples (7, 17-23 <=> 8, 14-21)
– Jésus et la Canaanéenne (7, 24-30; sans parallèle en Mc 8)
– récit des guérisons (7, 31-37 <=> 8, 22-26)
> Trois annonces de la Passion (8, 31; 9, 31; 10, 32-34) qui dominent en 8, 27-10, 52
– confession de foi de Pierre à Césarée de Philippe (8, 27-33)
– exhortation à porter la croix (8, 34-9, 1)
– Transfiguration et dialogue lors de la descente (9, 2-13)
– guérison de l’enfant épileptique (9, 14-29)
– deuxième annonce de la Passion (9, 30-32) qui introduit un
– entretien avec les disciples (9, 33-50) et une
– leçon de catéchèse sur le mariage, les enfants et la richesse (10, 1-31)
– troisième annonce de la Passion (10, 32-34)
– entretien avec les fils de Zébédée (10, 35-45)
– guérison de l’aveugle Bartimée (10, 46-52)
* Derniers jours de Jésus à Jérusalem
– entrée de Jésus à Jérusalem (11, 1-10)
– purification du Temple (11, 11.15.19)
– malédiction du figuier (11, 12-14.20-26)
– série de controverses (11, 27-12, 44)
– discours apocalyptiques de Jésus (13)
* Récit de la Passion et de la Résurrection
– complot contre Jésus (14, 1-2)
– l’onction à Béthanie (14, 3-9)
– trahison de Judas (14, 10-11)
– Dernière Cène- Repas pascal (14, 12-31)
– à Gethsémani et arrestation de Jésus (14, 32-52)
– le Procès de Jésus devant les autorités juives (14, 53-72)
– le Procès de Jésus devant l’autorité romaine, Pilate (15, 1, 20)
– le chemin de croix et la crucifixion (15, 21-32)
– la mort et l’ensevelissement de Jésus (15, 33-47)
– les femmes au tombeau vide et le message d’aller en galilée (16, 1-8)
– les apparitions de Jésus ressuscité et l’envoi des disciples en mission (16, 9-20)
IX.3.2. Message ou théologie de Marc
Ce message apparaît comme le déroulement d’un drame centré sur la personne de Jésus et sur les rapports personnels qu’il engage avec les hommes. Jésus révèle à la fois le mystère se son être et la radicalité du Règne de Dieu agissant efficacement au coeur de l’humanité. En Jésus, Dieu se révèle peu à peu: le possédés l’appellent « le Saint de Dieu » (9, 24) ou « fils de Dieu » (3, 11): le disciples le reconnaissent comme le Messie (8, 29), le fils de David (10, 47). Mais Jésus refuse les confessions prématurées (=> secret messianique). Lui préfère se désigner comme 3 Fils de l’homme » (2, 10.28; 9, 31; 10, 33; 14, 62. Ce titre renvoie au mystère d’abaissement et de glorification de Jésus, car Marc associe constamment souffrance et gloire. si l’évangile est écrit à Rome, il reflète les persécutions qu’endurent les chrétiens. En faisant mémoire de Jésus qui a souffert et qui est glorifié, ils renouvellent leur foi en sa présence vivante.
IX.3.3. L’auteur
La tradition le désigne comme un disciple de Pierre et son interprète authntique. On l’identifie avec Marc des lettres pauliniennes (Col 4, 10; Ac 12, 25; 13, 13; 15, 39). Prisonier avec Paul (Phm 24); mission en Asie Mineure (Col 4, 10); retour à Paul (2 Tm 4, 11). La mention à Rome (1 P 5, 13) de Marc comme « fils très cher » de l’apôtre Pierre fait penser que marc se mit à son service après la mort de Paul.
IX.4. Evangile selon Saint Luc
IX.4.1. Destinataire et date
Luc présente son oeuvre en deux parties fortement unies: l’évangile, consacré à la vie de Jésus, évoque et interprète ses paroles et actions jusqu’à sa mort et sa résurrection; les Actes montrent comment les disciples et leurs successeurs parlent et agissent dans la force de l’Esprit Saint répandu par Jésus ressuscité et exalté. Deux préfaces, une à chaque oeuvre (Lc 1,1-4; Ac 1,1-3) soulignent la solidité du témoignage que l’auteur rapporte. L’évangile et les Actes se caractérisent par l’usage d’une même langue et la même pensée théologique. Païen d’origine, Luc s’adresse à des chrétiens venus du paganisme. Il rédige en historien croyant, s’efforçant de faire ressortir le sens des événements plutôt que de les décrire avec exactitude formelle. Il suit Marc, mais il omet Mc 6,45-8,26. Probablement avec Matthieu, il utilise aussi la « source » Q. Certaines traditions lui sont propres, mais il est difficile d’en déterminer la source. Les rapports étroits avec Jean sont aussi à noter (Lc 7,36-50 : interprétation similaire en Jn 13,1.10-11.34; Jn 12,1-3). La similitude entre Jn 13,5 et Lc 7,36b témoigne d’un usage d’un document commun et le double témoignage de Luc (22,24-27 et 7,36-50) confirme que l’épisode du lavement des pieds provient des traditions communes aux deux évangélistes.
Luc est certainement postérieur à Marc. Le logion apocalyptique de Mc 13,14 est reproduit en Lc 21,20 avec une allusion claire aux événements de la destruction de Jérusalem : ‘Quand vous verrez Jérusalem encerclée par les armées, sachez alors que l’heure de sa dévastation est arrivée » E plus loin, il dit: « Jérusalem sera foulée aux pieds par les païens jusqu’à ce que soit accompli le temps des païens » (Lc 21,24; cf. aussi 19,43-44). Luc a donc dû être composé après 70. Comme l’évangéliste a écrit à peu près en même temps que Matthieu, mais indépendamment de lui, il faut situer l’évangile selon Luc entre 80 et 90.
IX.4.2. Structure de l’évangile selon Saint Luc
* Trois grandes parties :
– le ministère de Jésus en Galilée; le voyage; Jésus à Jérusalem
Chapitres 1-2 : deux récits de la naissance et de l’enfance où Luc veut montrer la supériorité de Jésus sur Jean-Baptiste
Lc 3,1-4,13 : début du ministère en Galilée
Lc 4,14-9,50 : description du ministère de Jésus en Galilée
Luc suit de plus près Marc à l’exception d’une petite section propre à Lc 6,20-8,3 :
– discours dans les plaines (6,20-49)
– centurion de Capharnaüm (7,1-10)
– jeune homme de Naïm (7,11-17)
– propos de Jésus sur le Baptiste (7,18-35)
– pécheresse au pieds de Jésus (7,36-50)
Lc 9,51-19,27 : voyage vers Jérusalem
– une longue section propre à Lc 9,51-18,14 : certains passages importants :
– hostilité des Samaritains (9,51-56)
– trois candidats à la suite de Jésus (9,57-62)
– l’envoi de 72 disciples (10,1-20)
– la parabole du bon Samaritain (10,25-37)
– les invectives contres les Pharisiens et les Scribes (11,37-54)
– les trois paraboles sur la perte (Lc 15)
– une parabole du gérant habile et celle du riche et Lazare (16)
– le Samaritain lépreux reconnaissant (17,11-19)
– une série de loggia sur le Règne de dieu et le Fils de l’homme (17,20-37)
– le juge injuste et la parabole du Pharisien et le Publicain (18,1-14)
– en 18,15-43, Luc reprend Mc 10,13-52
– la bénédiction des enfants
– le jeune homme riche
– la troisième annonce de la Passion et guérison de l’aveugle près de Jéricho
– le récit du salut de Zachée (19,1-10)
– la parabole des mines (19,11-27)
Lc 19,28-21,38 : ministère de Jésus à Jérusalem (Luc suit Marc)
– l’entrée à Jérusalem (19,28-40)
– la lamentation de Jésus sur Jérusalem (19,41-44)
– la purification du Temple (19,45-48)
– une séquence de controverses (20 == Mc 11,27-12,40)
– le discours eschatologique (21 == Mc 13)
Lc 22-24 : Récit de la Passion et de la Résurrection
– Luc suit Marc, en y ajoutant d’autres éléments en Lc 24,13-53
– complot contre Jésus (22,1-6)
– repas pascal (22,7-38)
– prière au mont des Oliviers (22,39-46)
– arrestation, procès et crucifixion de Jésus (22,47-23,43)
– mort et ensevelissement de Jésus (23,44-56)
– le message au tombeau sur la résurrection de Jésus (24,1-12)
– apparition aux disciples d’Emmaüs (24,13-35)
– apparition aux Onze (24,36-49)
– ascension (24,50-53)
Rapport entre le texte de Luc et celui de Marc
Lc 4,31-6, 19 (sauf 5,1-11) = Mc 1,21-3, 19 : séjour à Capharnaüm
Lc 8,4-9, 50 = Mc 4,1-9,41 : paraboles et guérisons
Lc 18,15-43 = Mc 10,13-52 : famille et richesse
Lc 19,45-22,13 = Mc 11,15-14,16
Chez Luc, on trouve une omission de = Mc 7,1-37 : questions spécif. juives
IX.4.3. La théologie de Luc
Luc veut rendre l’Evangile plus accessible au public helléniste, en corrigeant les hébraïsmes de Marc et ceux de Matthieu (P. Grelot, Introduction aux livres saints, Librairie classique Eugène Belin, Paris, 1963, p. 298). Pour cela il a un peu laissé dans l’ombre la relation de Jésus avec le Judaïsme officiel. Luc veut montrer en Jésus la Lumière des nations. Ce thème est évident dans les récits de l’enfance (Lc 2,32; Is 49,6) et dans la généalogie de Jésus, qu’il fait remonter jusqu’au premier père de l’humanité. Luc a des thèmes préférés, comme la miséricorde de dieu envers les pécheurs et les hommes souffrants (6,11-17.36-50; 15); les vertus de la spiritualité chrétienne : pauvreté effective (6,20.24; 12,13-34; 14,25-33; 16), charité fraternelle (10,25-37), joie et louange de Dieu (2,10; 24, 52-53). Tous ces thèmes ont une place importante dans les textes propres à Luc (1-2; 11,51-18, 14).
A travers tout l’évangile, Luc n’est pas un historien au sens moderne du terme; c’est un évangéliste qui charge ses récits de traduire une véritable théologie, dans l’enfance comme dans la vie publique de Jésus.
C’est l’expérience de la présence de l’Esprit Saint dans la mission de l’Eglise qui a fait découvrir à l’évangéliste ce qu’est le salut en acte. Luc fait apparaître l’Esprit Saint comme la puissance de Dieu tangible dans l’activité des hommes et le déroulement de l’histoire (Ac 1,8). Pour lui, le centre de l’histoire du salut est l’événement et la personne de Jésus (2,14).
IX.4.4. L’auteur du troisième évangile
Suivant la tradition, il est d’origine païenne, syrien, médecin de profession (Col 4,14), compagnon et collaborateur de Paul (Phm 24; Ga 4,14; 2 Tm 4,11). Dans les Actes certains textes des actes, l’auteur paraît rapporter des souvenirs personnels (« récits en nous » : 16,10-17; 20,5-21, 18; 27,1-28, 16). L’attribution du troisième évangile à Luc, compagnon de Paul, remonte à Irénée de Lyon (140-202) et au Canon de Muratori (IIe siècle).
L’analyse de l’oeuvre de Luc (Luc et Actes) nous permet de découvrir que l’auteur est un helléniste et un pagano-chrétien cultivé, qui par sa manière de présenter l’histoire de Jésus et les débuts de l’Eglise, a voulu faire parvenir le message chrétien au monde hellénistique.
IX.5. Evangile selon Saint Jean
IX.5.1. Destinataire et milieu
La comparaison avec les synoptiques fait ressortir des différences notables dans le quatrième évangile : le ministère de Jésus s’y déroule alternativement en Galilée et en Judée; sa durée de trois ans est marquée par un triple pèlerinage avec activité à Jérusalem; sept miracles seulement retenus, la plupart propres à Jean. Jean déploie une symbolique théologique particulière centrée sur la personne de Jésus, révélateur du Père, envoyant l’Esprit Saint, proposant le commandement de l’amour. Le caractère polémique n’est pas un antisémitisme johannique.
L’intention du quatrième évangile (20, 20, 30-31) semble bien de conforter des chrétiens venus du judaïsme qui, à la fin du 1er siècle, se voient exclus de la synagogue (9,22; 12,42) par décision des autorités religieuses juives. La communauté nourrissait en son sein des « prophètes de mensonge » (1 Jn 4,1) qui, méconnaissait l’identité du Christ, dissociaient son humanité de sa divinité (1 Jn 2,18-23). La communauté a du traverser la persécution déclenchée à Rome par Néron 64 (cf. Ap 17,6), dont on retrouve échos en Jn 15,18-20; 16,2. Il fallait éclairer ces chrétiens sur le plan de la réflexion christologique et les exhorter à assumer leur vie chrétienne avec courage et persévérance.
IX.5.2. Structure et contenu
Une articulation en deux grandes parties peut rendre compte de la structure interne du texte du quatrième évangile : dans la première, Jésus s’adresse aux hommes, aux foules ou aux particuliers (1,19- 12,50); dans la seconde il vit dans la proximité de ses disciples (13,1-21, 25). L’ensemble est couronné par un prologue (1,1-18), hymne christologique annonçant les grands thèmes de l’évangile : la Parole éternelle de Dieu, préexistant à la création, s’incarne dans l’histoire des hommes pour répandre sur eux grâce et paix et les introduire dans l’intimité divine.
A. Première et deuxième sections de la première partie :
– 1ère section : Jésus révèle son identité, fils de Joseph, le Messie (1,41.45; 6,42)
– 2e section : Jésus comme l’Envoyé du Père (7-12) dont l’heure de gloire est annoncée.
B. Troisième et quatrième sections dans la deuxième partie:
– 3e section : les discours d’adieux de Jésus à la manière de Moïse (13-17; cf. Dt 31)
– 4e section : récit de la passion et de la résurrection (18-21)
* Un autre plan de l’Evangile de Jean :
I. Prologue (1,1-18)
II. Livre des Signes (1,19-12,50)
1. Rassemblement des disciples (1,19-4, 54)
2. Discussion sur les actes et les paroles de Jésus (5,1-10, 42)
3. Jésus donne la vie, mais le monde décide sa mort (11,1-12, 50)
III. Livre de la gloire (13,1-20, 31)
1. Dernier repas (13,1-17, 26)
2. Récit de la Passion (18,1-19, 42)
3. Jésus Ressuscité (20,1-29)
4. Conclusion : le dessein de l’Evangile (20,30-31)
IV. Epilogue (21,1-25)
IX.5.3. Théologie de Saint Jean
Le quatrième évangile contient une théologie de la révélation : Jésus, « l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde » (1,29), « le Sauveur du monde » (4,42), est le Fils unique de Dieu (1,14.18; 3,16.18), « la Parole » (1,1) qui dévoile aux hommes l’intimité divine (1,18) et leur donne accès à la vie éternelle (17,2). Cette mission révélatrice se prolonge par l’oeuvre de l’Esprit vivifiant (6,63), qui en atteste l’authenticité et la fécondité (12,24; 15,8-10; 16,8-10.13-14). L’incarnation du Fils est une théophanie. En référence à la théophanie du buisson ardent (Ex 3,14). Jésus proclame sa divinité (10,33), par la formule « Je suis » employée seule (8,24.28.58; 9,9; 13,19; 18,5.6.8) ou assortie d’un épithète (8,12, etc…). Sa mission et son identité se dévoile conjointement : le Fils vit par le Père (6,57) et leur mutuelle inhabitation est donnée à reconnaître (10,30.38; 17,21-23). L’Envoyé nous achemine vers le mystère trinitaire. Au chapitre 16, l’insistance sur l’enseignement que recevra les disciples met en évidence le rôle de la Trinité dans une structure concentrique([34]) :
16, 1-6 : Situation angoissante – Rejet de la Synagogue A
16, 7-11 : Envoi du Paraclet. Triple jugement B
16,12-15 : Esprit de vérité
v.13 : celui qui vient enseigner à vous
* l’Esprit qui enseigne
v.14 : de mien il prendra et enseignera à vous C’
* l’Enseignement est du Christ
v.15 : tout ce qu’a le Père à moi est
au mien il prendra et enseignera à vous
* mais, l’enseignement du Christ vient du Père
16,16-24 : La Tristesse deviendra joie. Triple joie. B’
16,25-33 : Le Père est avec le Fils; pais pour les disciples A’
L’élévation sur la croix est aussi l’exaltation (3,14; 8,28), par laquelle Jésus-Christ attire tout à lui (12,32). Le moment qui marque notre salut, c’est « l’heure où le Fils de l’homme meurt, retournant au Père et entrant dans sa gloire définitive (12,23.33; 13,1-3). Celui qui croit à l’Envoyé peut dès lors accéder à « la vie éternelle », participation à la vie même de dieu (6,56; 15,4.7) et communion à son amour (15,9-10). Or Dieu est lui-même amour (1 Jn 4,8.16), et la communion avec lui s’épanouit en charité fraternelle (13,34-35; 15,12-17). C’est le sens du « commandement nouveau » : aimer les frères avec l’amour même de Dieu. Les sacrements apparaissent comme la mise en oeuvre de l’incarnation salvatrice. La notion de témoignage rend compte de l’originalité johannique : le témoin raconte l’histoire en termes de « signes » de salut. Ainsi les réalités cosmiques ou les gestes de Jésus, les données géographiques ou le sens de fêtes juives deviennent pour Jn l’expression concrète de l’oeuvre du Verbe incarné assumant l’histoire des hommes et transfigurant leur univers.
L’Ecriture est à la base de la réflexion de Jean : thèmes, figures, symboles, institutions, messianisme, s’inspirent de la Bible d’Israël, que Jean lit dans une visée christologique : la Torah de Moïse s’accomplit dans l’oeuvre du Fils. L’influence du judaïsme pluraliste ne manque pas : midrash, targum, Qumrân offrent des points de contact.
Les lettres johanniques semblent une correction aux mauvaises interprétations de la christologie élaborée dans l’Evangile johannique (1 Jn 4,2-3; 2 Jn 7) et un rappel du « commandement nouveau » (1 Jn 3,11.23).
IX.5.4. Auteur et date
La tradition de l’Eglise considère Jean l’apôtre (hb. Yôhanan = « Dieu a fait grâce »), le fils de Zébédée, comme l’auteur du quatrième évangile. Mais les données internes attribue le témoignage au « disciple que Jésus aimait » (Jn 19,35; 21,24; 13,23; 19,26) ou « chérissait » (20,2; 21.7.20,24). Qui est ce disciple ? Familier de Jésus, ancien disciple du Baptiste (1,37) originaire de la Judée, car connu du grand-prêtre (18,16). Il est souvent nommé avec Pierre (Jn 13, 24-25; 18, 15; 20, 3; 21, 20; Ac 3-4; 8, 14-17). Il n’est pas mis explicitement au nombre de Douze, mais la comparaison avec les Synoptiques l’a fait identifier à l’apôtre Jean. Les sources traditionnelles sur l’attribution du quatrième évangile date du IIe siècle: Irénée de Lyon (en 180), Polycarpe d’Ephèse (en 190), Clément d’Alexandrie (+ vers 215), le Canon de Muratori et les prologues latins anti- marcionites (IIIe siècle). Généralement les critiques reconnaissent, au départ de la tradition johannique, le témoignage de l’apôtre, sans exclure l’intervention des disciples de l’école johannique aux diverses étapes de la rédaction de l’évangile. Le noyau primitif serait rédigé en Judée et la rédaction finale à Ephèse.
IX.5.5. Un autre écrit johannique d’actualité : l’Apocalypse
L’Apocalypse fait partie des textes difficiles dont les gens sans formation tordent le sens (2 P 3,15-16). Composée, semble-t-il sous le règne de Domitien (81-96), deuxième persécuteur des chrétiens après Néron (54-68), l’Apocalypse reflète une situation dramatique pour les chrétiens. Quelques sources anciennes permettent de dater l’Apocalypse différemment.
1. Les preuves externes situent l’exil et le bannissement de Jean à différente époque : durant le règne de Claude (41-54; Haer. 51,12.32); durant le règne de Néron (titres de deux versions syriaques de l’Apocalypse bannissement entre 60-68); pour Tertullien, cité par Jérôme, c’est sous Néron (cf. Adv Yovin 1,26) et pour Théophylacte, le bannissement a eu sous Trajan (98-117).
2. Les preuves internes font certaines allusions aux événements antérieurs à la destruction du Temple.
Ap. 11,1-2 semble postuler que le temple terrestre est encore debout. S’agit-il du temple spirituel ou d’un texte antérieur utilisé par Jean. L’usage fréquent de Babylone suppose que Rome a été le plus ancien antitype de la cité (14,8; 16, 19; 17,5; 18,2.10.21). Babylone est le type de la cité païenne, orgueilleuse, idolâtre, qui vit dans le luxe. A ce moment Rome est le reflet de Babylone, c’est-à-dire que la ville avait du prestige comme Babylone et pratiquait les abominations de Babylone (2 Esd 3-14, 2; Or Si 5). Mais Babylone n’est pas le seul nom que l’on donnait à Rome dans le milieu juif. Pour les Juifs Rome est aussi appelé Egypte. Kittim et Edom, les noms des ennemis de Jérusalem. Il y a similitude entre les deux dans leur rôle identique dans le destruction du Temple de Jérusalem (Babylone en 587 av. J.C. et Rome en 70 ap. J.C.). L’usage de cette typologie implique solidement que l’Apocalypse dans sa forme actuelle, ait été composée après 70. Donc il n’y a pas de raison contraignante pour mettre en doute la datation traditionnelle de l’Apocalypse à fin du règne de Domitien (95-96). Mais il faut tenir compte du fait que le premier grand persécuteur des chrétiens fut Néron (54-68). Il pourrait être utilisé comme symbole de la persécution. Selon Méliton de Sardes, seuls les empereurs dont la réputation était déjà mauvaise parmi les romains eux-mêmes ont persécuté les chrétiens. Par exemple, Néron. Domitien est appelé Second Néron par certains latins Juvénal, Sat. 4,38; Pline le Jeune).
3. Les persécutions effectives connu sont : le bannissement de Jean (1,9); l’exécution d’Antipas (2,13), à cause de la dénomination des Juifs; imminence de l’arrestation de plusieurs chrétiens à Smyrne (2,10).
Le but premier de l’Apocalypse était de fortifier la foi des chrétiens en Jésus-Christ et présenter l’histoire qui doit se dérouler à la fin de laquelle Jésus triomphera contre tout ce qui s’oppose à lui, notamment l’Empire Romain. Pour mieux comprendre les écrits johanniques, il faudrait lire les auteurs suivants :
Léon Dufour, Lecture de l’Evangile selon St Jean, 3 tomes, Cerf, Paris 1988-1993.
René Kieffer, Le monde symbolique de St Jean (Lectio Divina 137), Cerf, Paris 1989.
J.P. Charlier, Pour comprendre l’Apocalypse.
IX.5.6. Interprétation des quelques passages difficiles de l’Apocalypse
Le chapitre sept contient deux visions : 144.000 et une foule immense des sauvés. Ces deux visions se trouvent entre le 6e et 7e sceau. Il y en a aussi deux entre la 6e trompette et la 7e. Le 5e sceau présidait la persécution des chrétiens (6,9ss); le 6e sceau présidait le châtiment des persécuteurs (6,12-17). Dans nos deux visions apparaît un troisième thème; le salut de ceux qui ont suivi l’Agneau. L’absence de lien littéraire entre ces deux visions, d’une part et l’énumération de deux sceaux d’autre part, met ces visions en relief (pour attirer notre attention). Leur but est d’établir un contraste entre l’Eglise glorieuse et protégée par Dieu et les « habitants de la terre » saisis de panique à l’approche du jugement (6,15-17).
a. La première vision : 144.000 sauvés (7,1-8)
Selon une coutume largement répandue chez les anciens, les seigneurs orientaux marquaient du sceau de leur anneau tout ce qui leur appartenait. Tout ce qui était marqué se trouvait alors sous la protection du seigneur (cf. Ez 9,4; Ex 12,7-14). Quiconque porte la marque du sceau du Dieu vivant est devenu sa propriété (2 Co 1,22; Ga 6,17; Ep 1,13; 4,30; Jn 6,27). Cela donne aux chrétiens la force de persévérer dans la foi, malgré la persécution. Le sceau (v.3) est peut-être l’équivalent du nom de Dieu dont est marqué le front du croyant (3,12: 14,1; 22,4).
Les 144.000 représentent un chiffre de 12000 de chaque tribu d’Israël. Il ne faut pas prendre ce chiffre à la lettre, mais pour sa valeur symbolique. Il s’agit d’une appartenance non physique, mais spirituelle aux 12 tribus. En effet l’appartenance au peuple d’Israël n’est plus avant tout une question de naissance (voir 2, 9; 3,9) : « Ceux qui se prétendent juifs, ils ne le sont pas ». Il s’agit des juifs qui calomniaient les chrétiens pour que ces derniers soient persécutés. « Ceux qui se disent juifs, mais ne le sont pas, car ils mentent ».
« Douze » est le symbole de la perfection, spécialement dans le domaine physique et humain. Il s’agit de tous les membres de l’Eglise, le Véritable Israël (Israël dans toute sa perfection : 12 X 12 X 1000). Le judaïsme nourrissait l’espoir que tout Israël serait complètement restaurés avec ses douze tribus aux temps messianiques (Is 49,6; Ps Salomon 17, 44; Bar 78,1ss; 2 Esd 13,39-50). Les premiers chrétiens voyaient cette espérance réalisée dans l’Eglise du Christ (Mt 19,28 : « Lors du renouvellement de toute chose, vous qui m’avez suivi, vous siègerez, vous aussi, sur les douze trônes pour juger les Douze tribus d’Israël »; cf. Ga 6,16; Jc 1,1: Rm 2,29; Ga 3,29; Ph 3,3; 1 P 1; Jn 1,47.49). D’autres exégètes pensent que les 12 tribus représentent les rares juifs qui on cru en Jésus-Christ (J.P. Charlier).
b. La deuxième vision : le salut de la multitude (Ap. 7,9-17)
La seconde vision décrit le salut final des justes. C’est le point culminant du récit de sept sceaux. Après le test final, la multitude des chrétiens victorieux de la persécution apparaissent en pleine gloire. Les vv. 9-12 décrivent le triomphe des élus alors que les vv. 13-17 expliquent les principaux détails qui symbolisent leur bonheur. Au v.9, il y a un contraste entre les personnes de cette vision et celles de la vision précédente. Le premier groupe est compté méticuleusement alors que le second ne peut être dénombré. Le premier vient du peuple d’Israël (au sens propre ou au sens métaphorique du terme) et le second de toutes les nations. Nous sommes là en présenced’une allusion à la promesse faite à Abraham (Gn 12,3; 15,5; 32,13; He 11,12).
Au v.14, la grande tribulation (thlipsis, en grec) signifie la crise de la fin des temps, mais en incluant la persécution des fidèles (1,9,2,9; 3,10 : thlipsis).
En union avec Jésus, les chrétiens sont régulièrement soumis aux épreuves, mais la grande tribulation décrite en 13,7-10 en marquera la fin. « Ce sont ceux qui sont venus » sont aussi bien les martyres que tous les membres de l’Eglise restés fidèles jusqu’à la crise finale. Ainsi cette seconde vision prolonge la précédente qui concerne toute l’Eglise sur la terre. « La robe blanche » signifie la plupart du temps la gloire céleste des élus (3,5; 6,11; 7,9,13; 19,8) et des anges (4,4; 19,14). Elle est l’image d’une condition véritable de celui qui est chrétien : un don fait par le Christ au moment où l’on devient chrétien membre de l’Eglise, mais il y a le danger de perdre de don; aussi la robe blanche comporte pour les chrétiens sur terre un aspect moral (3,4). Le sang de l’Agneau est le symbole de la mort du Christ et de sa valeur salvifique (Ep 1,7; Col 1,20; He 9,14; 1 P 1,2.19; 1 Jn 1,7). La formule « dans le sang » est stylisée dans le N.T. (Rm 3,25; 5,9; 1 Co 11,25; Ep 2,13).
IX.5.6.3. Hypothèse générale sur le 666 dans Ap 13
Les Hébreux et les Romains n’avaient pas de chiffre arabe comme aujourd’hui. Ils utilisaient donc les lettres de l’alphabet pour compter, par exemple : alef = beit = 2; guimel = 3; dalet = 4; hé = 5; waw = 6; zaïn = 7; het = 8; thet = 9; yod = 10; kaf = 20; lamed = 30; mèm = 40; nun = 50; samekh = 60; ‘aïn = 70; pé = 80; tsadé 90; qof = 100; resh = 200; shin ou sin = 300; tau = 400.
Ainsi en hébreu où l’on n’écrit pas de voyelle, on calculait le nom de Néron (NRWN) César (QSR) comme suit :
N = 50
R = 200
W = 6
N = 50
Q = 100
S = 60
R = 200
Total : 666.
Dans d’autres manuscrits on trouve le chiffre 616, car en latin Néron est écrit Nero, donc 50 en moins, cela donne 616. « C’est aussi le nombre qui correspondrait à Néron César en lettres grecques. On choisit de calculer sur le nom de Néron, car il est le premier empereur qui a persécuté les chrétiens avant Domitien.
IX.6. Les lettres du Nouveau Testament
La Résurrection est le point de départ de l’Eglise. Rapidement des communautés se sont formées non seulement en Palestine mais dans tout le bassin méditerranéen. Un artisan inlassable de cette expansion fut l’apôtre Paul. Cette époque, pleine de la jeunesse de l’Esprit, nous est contée dans les Actes des Apôtres qui furent rédigés vers les années 80.
Bientôt des lettres, dont beaucoup furent écrites par Paul, se mirent à circuler d’une communauté à l’autre. La première date de 51 : elle est adressée aux Thessaloniciens. La plupart sont à situer entre 51 et 70. C’est le début de la littérature chrétienne et donc du «Nouveau Testament». Viendra ensuite l’étape de la rédaction des Evangiles.
Ces lettres de Paul, Pierre, Jacques, Jean et Jude sont des écrits de circonstance envoyés soit à des communautés, soit à des individus. Mais à travers elles, c’est la théologie chrétienne qui prend naissance.
Dans l’antiquité, on appelait lettre un écrit privé à une personne ou à un groupe précis. On donnait le nom d’épître à des écrits davantage publics. Les lettres des apôtres vont très vite se mettre à circuler en dehors de la communauté pour laquelle elles ont été écrites (Col 4,16). Elles méritent donc le nom d’épître, qui est un genre littéraire tout comme un évangile ou une apocalypse.
Les écrits que l’on range sous ce nom ne sont cependant pas tous de véritables lettres. Ainsi la lettre aux Hébreux est un traité de théologie dont l’auteur est demeuré inconnu. L’épître de Jacques est une exhortation et celles de Pierre et de Jean sont plutôt des sermons.
IX.6.1. La vie de Paul, auteur de plusieurs lettres
Si Paul est la figure la plus connue du N.T., au point que certains l’appellent le deuxième fondateur du christianisme. La documentation que nous avons sur lui dépasse de loin celle concernant les apôtres fameux comme Pierre, Jean et Jacques. En ce qui concerne la chronologie un repère sûr est la comparution de Paul devant Gallion (Ac 18,12), dont le proconsulat est daté par une inscription de Delphes de 51-52, ce qui place le séjour de Paul à Corinthe entre l’hiver 49-50 et l’été 51. Dans ces conditions on peut situer son deuxième voyage missionnaire entre 49 et 52.
Né à Tarse, ville grecque (Ac 9,11; 21,39; 22,3) entre 5 et 10 ap. J.-C. des parents honorables, il appartient par un côté à la civilisation hellénistique. Venu à Jérusalem (Ac 22,3-4), il devient le disciple de Gamaliel l’Ancien, le célèbre rabbi. Jeune encore, mais pharisien intolérant, il « persécutait l’Eglise de Dieu », faisant mettre en prison et flageller les chrétiens (Ac 7,58; 8,1-3;9,1-2; 22,3-5; 26,9-11; Ga 1,13-14; 1 Co 15,9; Ph 3,6). Les récits (Ac 9,1-19; 22, 6-16; 26, 12-18) sur sa conversion concordent sur l’essentiel : vision de lumière de type apocalyptique, voix qui dit : « Saoul »; bref dialogue; cécité temporaire. Après son baptême, il rejoint la communauté chrétienne de Damas. Après la conversion s’ouvre une période peu connue. Ga 1,17 parle d’un séjour en Arabie. Il revient à Damas, où sa prédication soulève l’hostilité des Juifs. Ils sera descendu par des « frères » dans une corbeille le long des murailles de la ville et s’enfuit (Ac 9,24-25; 2 Co 11,32-33). « Trois ans après » (Ga 1,18), il se rend à Jérusalem. Selon Ac 9,26-27, il est introduit par Barnabé auprès des apôtres, d’abord réticents; d’après Ga, 18-19, il voit seulement Céphas (Pierre) et Jacques, « frères du Seigneur », et il ne reste que quinze jours auprès de Pierre. Après des controverses avec des hellénistes (Ac 9,29-30) il doit encore s’enfuir pour Tarse. C’est encore Barnabé qui alla le chercher à Tarse (Ac 11,25) et l’amena à Antioche pour collaborer avec lui. C’est de là que, vers 46, avec Barnabé et Jean Marc, Paul partit pour son premier voyage missionnaire.
* Premier voyage missionnaire de Paul : Chypre, Pamphylie, Lycaonie (Ac 13-14). Le problème de la circoncision des païens convertis : le concile de Jérusalem (Ac 15,1-29; Ga 2,1-10). Entre 46 à 48.
* Deuxième voyage : Lycaonie, pays galate, Troas, Macédoine (Philippes, Thessalonique), Athènes, Corinthe, retour à Antioche via Ephèse (Ac 15,41 – 18,22). Entre 49 et 52.
* Troisième voyage : Galatie, Ephèse (plus de deux ans), Macédoine, hiver à Corinthe, retour à Jérusalem (Ac 18,23-21, 17). Entre 53 à 58. Ce schéma tracé à partir des Actes peut être bien complété par une lecture attentive des épîtres, spécialement de 1 et 2 Corinthiens.
C’est au cours de ces différents voyages missionnaires que Paul fonda beaucoup de communautés chrétiennes et connut des collaborateurs. Aux premières et aux derniers il écrivit quelques lettres, traitant de la doctrine chrétienne (Ga) et de la discipline chrétienne selon les circonstances de chaque communauté.
Comme les autres écrits du Nouveau Testament, les épîtres de saint Paul ne peuvent être datées que de façon approximative([35]). On le met en rapport avec la chronologie de la vie de l’apôtre :
Année Lieu de composition Epître
51 Corinthe 1e et 2e Thessaloniciens
56 Ephèse aux Philippiens
57 Ephèse aux Galates
1e aux Corinthiens
Macédoine 2e aux Corinthiens
57-58 Corinthe aux Romains
61-63 Rome (Philippiens ?)
aux Colossiens
aux Ephésiens
à Philémon
65 Macédoine 1e à Timothée
à Tite
67 Rome 2e à Timothée
IX.6.2. Introduction à certaines épîtres du N.T.
IX.6.2.1. LA PREMIERE AUX CORINTHIENS (écrite en 56)
Tout ne va pas très bien dans la jeune communauté de Corinthe fondée par Paul quelques années plus tôt, entre 50 et 52. Tant au niveau moral que culturel, de graves questions se posent. C’est à celles-ci que l’Apôtre s’emploie à répondre. Il jette ainsi les bases de la morale chrétienne dont le coeur est l’Amour. Nous trouvons ici une des plus belles pages de Paul : l’hymne à la charité (ch. 13).
Ce sont des entorses à la morale sexuelle qui amènent Paul à approfondir le sens chrétien du corps (ch. 5) tandis que d’autres questions posées par les Corinthiens entraînent un long développement sur le mariage (ch. 7). Les scandales qui ont éclaté parmi les frères à propos des pratiques païennes offrent à Paul l’occasion d’amorcer une réflexion sur la liberté (ch. 8).
C’est grâce aux désordres des assemblées à Corinthe que nous avons dans cette épître le plus vieux récit de l’institution de l’Eucharistie (ch. 11) et une réflexion sur les dons de l’Esprit, les fameux charismes (ch. 12). Le doute concernant la résurrection des morts nous donne un magnifique chapitre sur le coeur de la foi chrétienne : la résurrection du Christ et la nôtre (ch. 15).
Les problèmes ne manquent pas à Corinthe. Mais Paul éprouve vis-à-vis de ces nouveaux chrétiens un véritable souci paternel qui s’exprime dans cette lettre. N’est-ce pas lui qui, par l’Evangile, les a engendrés en Jésus-Christ (4,15) ? N’est-ce pas lui qui est venu chez eux avec le prestige de la sagesse et de la parole mais en ne connaissant que Jésus-Christ et Jésus-Christ crucifié (2,1-2) ?
IX.6.2.2. L’EPITRE AUX ROMAINS (écrite en 57)
Cette épître a eu beaucoup d’influence sur l’histoire de l’Eglise. Elle fut commentée par Origène, Jean Chrysostome, Théodoret, l’Ambroisiaster, Pélage, Augustin, Abélard, Luther, Calvin.
Paul est un juif convaincu, formé dans la stricte observance de sa religion à la manière pharisienne. Mais il a rencontré sur sa route Jésus le Ressuscité et, suite au refus de ses frères d’accueillir la bonne nouvelle, il est devenu l’apôtre des nations païennes. En envoyant Paul vers les Païens, quel plan Dieu poursuit-il ? Quel est le «Mystère» qui ainsi se révèle et quel y est la place d’Israël ? Tel est le thème de l’épître aux Romains.
Tous les peuples sont pécheurs, constate Paul, qu’ils soient juifs ou païens. Les uns ont désobéi à la Loi, les autres à leur conscience. Chaque homme est malheureux car il est écartelé entre deux lois, celle de la chair – c’est-à-dire du mal sous toutes ses formes – et celle de l’Esprit : «Ce que je veux, je ne le fais pas mais ce je hais, je le fais» (7,15). Qui donc pourra apporter la délivrance ?
Cette humanité pécheresse, Paul la résume en un symbole : Adam. Et Jésus-Christ, par sa mort et sa résurrection, est le Nouvel Adam, l’Adam réussi, dont le premier n’était que l’ébauche. Ce qui sauvera l’homme, c’est d’accueillir ce Jésus et d’avoir foi en Lui. Son salut est offert à tout homme, juif ou païen, gratuitement, indépendamment des oeuvres de la Loi, par le don de l’Esprit qui nous fait appeler Dieu «Abba» (ch. 8).
La désobéissance d’Israël, peuple élu, s’inscrit dans le dessein mystérieux de Dieu qui veut par là offrir le salut à tous les peuples. Mais les païens n’exciteront-ils pas par leur foi la jalousie d’Israël ? Ainsi Paul garde-t-il l’espoir qu’un jour son peuple se convertira (Ch. 9-11).
A la lumière de cette théologie, Paul tire les conclusions pratiques pour la vie chrétienne de tous les jours. Les chapitres 12 à 16 nous décrivent cette existence transformée à laquelle sont appelés tous ceux qui ont été baptisés dans le Christ.
IX.6.2.3. L’EPITRE AUX GALATES (écrite en 56)
Les chrétiens sont nés pour la liberté des fils et non pour la servitude des esclaves. Ils ont été libérés par le Fils lui-même et vivent de la loi intérieure de l’Esprit (4,1-7). Mais voici que des prédicateurs «intégristes» veulent imposer à ces païens convertis l’esclavage de la Loi juive et leur demandent de se faire circoncire. Paul réagit énergiquement : Jésus crucifié et ressuscité suffit. Seule la foi sauve. Il ne faut pas la surcharger d’innombrables prescriptions comme si l’on pouvait ainsi mériter le salut. Ceci avait déjà été acquis au concile de Jérusalem, en 49, mais Paul est obligé d’y revenir à cause de nouvelles attaques. Cette lettre annonce celle aux Romains où les mêmes thèmes seront à nouveau et plus amplement développés.
IX.6.2.4. L’EPITRE AUX PHILIPPIENS (écrite en 56)
Paul n’est pas d’abord un théologien ou un moraliste. Il est avant tout un homme profondément croyant qui a tout misé sur Jésus-Christ. Dans de nombreux passages de ses lettres, on peut découvrir le mystique à travers les prières qui jaillissent spontanément sous sa plume ou à travers les allusions qu’il fait à ses épreuves.
Dans l’épître aux Philippiens, l’heure est à la confidence. Paul est en prison, sans doute à Ephèse, vers 56 ou 57. Il attend le jugement. Sa foi est plus forte que jamais : «Pour moi, vivre c’est le Christ et mourir m’est un gain» (1,21). Cette lettre est remplie de son amour pour «Jésus mon Seigneur» (3,8) et nous y trouvons reprise une hymne chrétienne très ancienne chantant l’abaissement volontaire du Christ et son élévation par Dieu (2,6-11). Dans le chapitre trois, le ton de Paul se fait encore plus convaincant : «Toutes ces choses qui étaient pour moi des gains, je les ai considérées comme une perte à cause du Christ» (3,7). L’Apôtre se sent tellement pris par ce Jésus qu’il n’hésite pas à écrire : «Imitez-moi» (3,17).
IX.6.2.5. L’EPITRE DE JACQUES (écrite en 60 ?)
Certains ont voulu opposer la lettre de Jacques et celle aux Romains. En réalité, elles se complètent admirablement. Alors que Paul proclame qu’en définitive c’est la croix du Christ qui nous sauve et que c’est dans la foi que nous accueillons ce salut, Jacques rappelle que sans les oeuvres, la foi est morte (2,26).
Jacques, le frère du Seigneur et le premier évêque de Jérusalem, procède un peu à la manière du selon sur la montagne. Il enchaîne, sans ordre rigoureux, diverses considérations morales qui découlent de la foi chrétienne. Ainsi, par exemple, il enseigne à maîtriser sa langue qui est souvent plus difficile à dompter que les bêtes sauvages (3,1-13). Il met en garde contre l’esprit de jalousie et de rivalité (3,14-18). Il invite à la prière (5,13-18). Il est très soucieux des pauvres dans la communauté et adresse des reproches aux riches qui participent aux assemblées mais n’ont que mépris pour les gens simples qui y sont. Nous trouvons ici (sur) la richesse des propos d’une grande sévérité qui rappellent les Evangiles et les prophète Amos (1,9-11; 2,1-13; 4,13-5-6). Il n’y a rien de tel pour retrouver les exigences chrétiennes que de relire cette épître vigoureuse qui nous invite à la droiture : «Que votre oui soit oui et votre non, non!» (5,12).
IX.6.2.6. LA LETTRE A PHILEMON (écrite entre 61 et 63
L’esclave Onésime s’est enfui de chez son maître à Colosse. Il rencontre Paul à Rome et se convertit à la foi chrétienne. Paul écrit alors à Philémon, le maître en question qui lui aussi est chrétien, pour qu’il reçoive son esclave fugitif avec indulgence. En effet, tous deux sont maintenant chrétiens et donc frères avant d’être maître ou esclave.
Voici donc Paul affronté à un problème brûlant : celui de l’esclavage. Mais il se contente de quelques recommandations à Philémon concernant la manière d’accueillir Onésime. Peut-être aurait-on souhaité qu’il prenne position plus nettement et qu’il condamne haut et clair cette pratique contraire à la dignité humaine. On ne peut cependant exiger de Paul qu’il soit en avance de 17 siècles sur son temps (en 1794, la déclaration française des droits de l’homme proclamera l’abolition de l’esclavage). Cependant, il faut constater que Paul, en s’adressant ainsi à Philémon, pose les bases de ce qui permettra un jour cette abolition : tous les hommes sont égaux aux yeux de Dieu. On n’est pas encore au but mais le tournant est pris. Philémon reste le maître mais il doit aimer Onésime comme un frère.
D’autres passages des épîtres pauliniennes parlent de la condition de la femme. Il faut les lire dans le même esprit. Paul ne peut pas être un «féministe» avant la lettre mais il faut reconnaître qu’il donne déjà aux femmes des droits qu’elles n’avaient pas de leur temps, ainsi celui de parler dans les assemblées. Ici aussi le tournant est pris. En Jésus-Christ, toutes les divisions s’effacent : «Il n’y a plus ni Juif, ni Grec; il n’y a plus ni esclave, ni homme libre; il n’y a plus l’homme et la femme; car tous, vous n’êtes qu’un en Jésus-Christ» (Ga 3,28). L’abolition de l’esclavage et la promotion de la femme sont dans la droite ligne de l’Evangile. La semence est déjà jetée en terre.
IX.6.2.7. L’EPITRE AUX EPHESIENS (écrite entre 61 et 63)
L’épître aux Ephésiens est par excellence celle de l’Eglise qu’elle définit tour à tour comme Corps du Christ, Maison de Dieu, édifice dont Jésus-Christ est la pierre angulaire, Temple saint, habitation de Dieu et même épouse de Christ. Dans un texte qui est sans conteste le plus beau concernant le mariage, Paul fait le lien entre cette dernière affirmation et ce sacrement (5,24-33).
Le chapitre 1er est un très bel hymne qui retrace toute l’histoire du salut qui s’origine dans le Père, se réalise dans le Fils et s’offre dans l’Esprit. Sa structure est nettement trinitaire et le Christ, à nouveau, est résolument au centre : il est cité 11 fois, précédé de nombreuses prépositions : en lui, par lui, dans lui, sous lui. En voici le plan :
Introduction : Béni soit Dieu le Père. L’hymne commence à la manière des bénédictions juives.
(3)
1° strophe : Notre élection par Dieu : il nous a choisis et prédestinés à devenir pour lui des
(4-6) fils, par Jésus-Christ.
Refrain : A LA LOUANGE DE SA GLOIRE
2° strophe : Notre rédemption par le Christ qui accomplit par son sang l’unification de
(7-12) l’univers et fait de nous son peuple.
Refrain : A LA LOUANGE DE SA GLOIRE
3° strophe : La marque de l’Esprit Saint qui est une avance sur l’héritage final.
(13-14)
Refrain : A LA LOUANGE DE SA GLOIRE.
Thèmes importants de l’épître au Ephésiens
UN SEUL BAPTEME (Ep 4,5)
Jésus a été baptisé à l’âge adulte, dit-on. Il est vrai. Mais le baptême de Jean n’est pas le nôtre. Il est simplement une invitation à la conversion : «Moi je vous baptise dans l’eau en vue de la conversion; mais celui qui vient après moi… vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu» (Mt 3,11 – voir Ac 18,25).
Jésus a reçu un second baptême, celui de sa mort et de sa résurrection : «C’est un baptême que j’ai à recevoir…» (Lc 12,50). Tel est le baptême chrétien : être plongé dans la mort et la résurrection du Christ (Rm 6,1-11). Baptizein, en grec, signifie en effet plonger.
Le baptême est le rite par lequel on entre dans la communauté de ceux qui sont ressuscités avec le Christ (Col 3,1) et qui sont les membres de son corps (1 Co 12,13). Le jour de la pentecôte, trois mille personnes s’adjoignirent à ce qui était le commencement de l’Eglise. Et lorsque quelqu’un se convertissait, toute sa maison le suivait, y compris les enfants. Ainsi, dès le Nouveau Testament est attestée la pratique de baptiser les petits enfants (voir Ac 10,2; 16,15.31.34; 18,8; 1 Co 1,16).
Ce rite pouvait se faire par immersion (Ac 8,38) ou en versant de l’eau sur la tête. La Didakè, un des premiers écrits chrétiens composé à la même époque que le Nouveau Testament, nous rapporte cet usage (Didakè 7,3). Cette eau est le signe de l’Esprit. Jean nous montre comment sur la croix, elle a coulé du côté du Christ (Jn 19,24).
Deux formules accompagnaient le baptême, soit : «Je te baptise au nom de Jésus-Christ» (Ac 2,38) ou bien : «… au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit» (Mt 28,19), formule que l’on retrouve dans la Didakè (7,13) et qui a ensuite prévalu dans l’Eglise.
Le baptême est en général suivi – parfois précédé (Ac 10,44-48) – de l’imposition des mains qui manifeste le don plénier de l’Esprit (Ac 8,15). C’est l’origine du sacrement que l’on appelle confirmation. Bien sûr, dès le baptême le chrétien reçoit l’Esprit. Il n’y a pas moyen d’être chrétien sans être habité par l’Esprit. Mais l’imposition des mains renforce ce don en vue de la mission. Le baptême fait entrer dans la communauté et la confirmation fait participer à sa mission, par la force de l’Esprit (Ac 13,3).
PREDESTINATION
«Il nous a prédestinés…» (Ep 1,5). Voilà quelques mots qui sont souvent compris comme si Dieu avait tout prévu et orienté d’avance, indépendamment de notre liberté. Il est vrai que Dieu nous a prédestinés mais à être ses fils adoptifs : «… à être pour lui des fils adoptifs par Jésus-Christ, ainsi l’a voulu sa bienveillance…» (Ep 1,6 voir aussi Rm 8,29).
En créant les hommes, Dieu poursuit un projet : les faire participer à sa plénitude. Avant même la création, Dieu a formé pour chacun d’entre nous le voeu que nous partagions un jour son bonheur. Dieu ne prédestine jamais à la damnation. Mais ce projet d’amour comporte aussi la liberté de l’homme : la béatitude éternelle à laquelle nous sommes appelés dépend de notre choix moral. La damnation est donc le résultat de notre liberté. Elle est la conséquence d’un refus libre de ce à quoi Dieu nous a prédestinés.
Notre liberté est créée pour réaliser le projet de Dieu mais elle est aussi capable de dire non. Rien n’est joué d’avance. Voilà pourquoi à la fin de l’épître Paul exhorte les chrétiens au combat de la foi (Ep 6,10-20).
L’hymne nous invite à rendre gloire au Père, c’est-à-dire à reconnaître la grandeur de son être. En hébreu, le mot gloire signifie poids, ce qui pèse dans la balance quand on estime la valeur de quelqu’un. Le poids de Dieu, son être, se manifeste dans ce qu’il fait pour nous en Jésus-Christ, son Fils bien-aimé. Mais cette oeuvre est loin d’être achevée. L’Esprit, qui nous est donné, n’est en quelque sorte qu’un commencement. Un jour tout – l’univers entier et toute l’humanité – sera «récapitulé» sous un seul chef, le Christ. Alors nous participerons tous à cet échange trinitaire puisque, habités par l’Esprit, nous serons en Jésus-Christ les Fils d’un même Père. St Irénée de Lyon, au deuxième siècle, fera de cette «récapitulation» le centre de sa théologie: «Le Verbe se fit homme, se rendant semblable à l’homme et rendant l’homme semblable à lui pour que, par sa ressemblance avec le Fils, l’homme devienne précieux aux yeux du Père» (Adversus haereses, V, 16, 2).
IX.6.2.8. L’EPITRE AUX HEBREUX (écrite vers 67)
Voici
un petit traité de théologie qui étudie les rapports entre l’Ancien et le
Nouveau Testament. Le point de comparaison est celui du culte. Jésus, le Fils,
par qui Dieu a créé le monde (voir 1,1-4), est présenté comme le Grand-Prêtre
par excellence, celui qui réalise une fois pour toutes ce que les prêtres de
l’Ancienne Alliance devaient refaire chaque année : l’offrande d’un sacrifice
pour l’expiation des péchés. L’offrande de Jésus, c’est son obéissance : «Tu
n’as voulu ni sacrifice ni offrande… Alors j’ai dit : Me voici !» (voir
10,1-9). Ainsi il a réalisé la liturgie définitive et a trouvé un accès auprès
de Dieu. Il est entré dans le sanctuaire céleste pour intercéder en notre
faveur (7,25; 9,24). Les chrétiens n’ont donc pas à regretter les belles
cérémonies juives car la mort et la résurrection du Christ nous ont obtenu le
pardon des péchés qu’aucun sacrifice de l’Ancien Testament n’avait pu obtenir :
«Ayant donc un grand prêtre éminent, qui a traversé les cieux, Jésus, le Fils
de Dieu, tenons fermes la confession de notre foi» (4,14 – voir 10,18).
Tandis
que circulent ces lettres, circulent peut-être aussi des recueils de paroles du
Christ qui servent de point de départ à la catéchèse dans les communautés.
C’est la première étape de la rédaction des Evangiles. Mais beaucoup de récits
sont sans doute encore transmis oralement. En 70, cependant, un premier
Evangile est déjà composé : celui de Marc.
([1]) Albert Vanhoye, « Salut universel par le Christ et validité de l’Ancienne Alliance » in NRT 116 (1994), 817.
([2]) Vanhoye, « Salut universel », 819.
([3]) Vanhoye, « Salut universel », 835.
([4]) R. Le Déaut, Targum, midrash et exégèse juive ancienne » in, Introduction critique au Nouveau Testament, I. Au seuil de l’ère chrétienne, Desclée, Paris 1976, p. 110.
([5]) C. Perrot, « La pensée juive au temps de Jésus », in Introduction critique au Nouveau Testament, I. Au seuil de l’ère chrétienne, Desclée, Paris 1976, p. 189.
([6]) Perrot, « La pensée juive », 201.
([7]) Robert M. Grant, La Formation du Nouveau Testament, éd. Seuil, Paris 1969, p.52-60.
([8]) Grant, La Formation, 60-61.
([9]) Grant, La Formation , 182.
([10]) Jean Doresse, LÉvangile selon Thomas p.110.
([11]) P. Benoît – M.-É. Boimard, Synopse des Quatre Évangiles en français avec parallèles des Apocryphes et des Pères, 4e édit. révisée par M.-É. Boismard et A. Lamouille et augmentée d’une concordance, Cerf, Paris 1987, IX-XI.
([12]) Grant, La Formation, 113.
([13]) Vatican II réitère l’enseignement de Pie XII, Divino afflante Spiritu, 30 sept. 1943: ASS 35 (1943), 314 et celui de Léon XIII, Providentissimus Deus, 18 nov. 1893,Denz 1952 (3293).
([14]) Grant, La formation, 187.
([15]) Grant, La Formation, 136.
([16]) Rm; 1 Co; 2 Co; Ga; Col; Ep; 1 Th; He
Grant, La Formation, 145.
Grant, La Formation, 154.
HARRINGTON, W., Introduction,, 117
HARRINGTON, W., Introduction,, 94.
L’interprétation de la Bible dans l’Église (document de la Commission Biblique Pontificale), Città del Vaticano, ROMA 1993, 28-33.
L’interprétation, 33.
L’interprétation, 34.
L’interprétation, 39.
L’interprétation, 40.
([26]) MVENG, E. & WERBLOWSKY, R.J.Z. (ed), Black Africa and the Bible, Jérusalem, 1972, pp. 10-11, cité par POUCOUTA, « Engelvert MVENG : une lecture africaine de la Bible », in NRT 120 (1998) pp. 32-45.
([27]) POUCOUTA, « Engelbert Mveng », p. 34.
([28]) MVENG & WERBLOWSKY, Black Africa, cité par Poucouta, « Engelbert Mveng », p. 34.
([29]) MVENG & WERBLOWSKY, Black Africa, p. 31, cité par Poucouta, « Engelbert Mveng »,
p. 34.
([30]) MVENG, Balafon, Yaoundé, 1996, p. 85, cité par Poucouta, « Engelbert Mveng », p. 35.
([31]) SEMPORE, « Le Noir et le salut dans la Bible, dans Universalisme et mission dans la Bible, Actes du 5e Congrès des biblistes africains, Abidjan, 16-23 juillet 1991, éd. Association Panafricaine des Exégètes Catholiques, Naïrobi, Catholic Biblical Center for Africa, pp. 18 et 20, cité par Poucouta, « Engelbert Mveng », p. 37.
L’interprétation, 65, note 3.
([33]) L’interprétation, 75-76.
([34]) Le chapitre 15 est également une révélation sur la Trinité en Jn 15 : vv. 1-8 : le Père est le vigneron; vv. 9-15 : l’amour du Fils; vv. 18-27 : le Paraclet. F. MANNS,L’Evangile de Jean, 347.
([35]) HARRINGTON, W., Introduction, p. 791.